El Arja : Les habitants de Figuig restent mobilisés et déterminés

 El Arja : Les habitants de Figuig restent mobilisés et déterminés

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L’ultimatum de l’armée algérienne est arrivé hier à son terme. Les fermiers d’El Arja, à 4 kilomètres de Figuig, ont été contraints de quitter les lieux. Une grève générale est en cours. Une marche pacifiste des habitants contenue dans la ville, s’est transformée en sit-in.

Depuis l’annonce de l’armée algérienne, les habitants de Figuig sont désemparés. Des fermiers qui cultivent les terres d’El Arja depuis 50 ans ont été contraints de quitter les lieux. Les propriétaires terriens demandent aux autorités marocaines de leur venir en aide. Les associations, autant au Maroc qu’en France, se mobilisent et créent une coordination nationale et internationale, pour porter le volet juridique de l’affaire.

Mounir Jamai est franco-marocain et secrétaire général de l’Association Espoir de Laabidat en France (AELF Figuig). « On cherche à alerter que ce soit médiatiquement ou juridiquement sur l’affaire d’El Arja. On se structure avec des associations de Figuigiens sur le continent américain et ailleurs. Une réunion a eu lieu avec l’ambassadeur du Maroc en France et un courrier a été transmis au roi Mohammed VI »

Hier, une marche pacifiste qui visait à se rendre à El Arja, n’a pu avoir lieu et s’est transformée en sit-in. « Les gens sont au pied du mur, dans le désarroi, explique le secrétaire général de l’AELF. On comprend que le but d’empêcher la manifestation pacifiste vers El Arja soit d’éviter une provocation avec l’armée algérienne. Si notre détermination est grande, l’enjeu sécuritaire et diplomatique reste au centre de nos préoccupations. »

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Un passé en commun avec les Algériens

Population frontalière avec l’Algérie, les habitants de Figuig ont du mal à saisir pourquoi ils sont la « variable d’ajustement » des relations entre les deux pays. Ainsi, Mounir Jamai nous rappelle ainsi que Figuig a toujours soutenu les Algériens dans leur volonté d’indépendance. « Cheikh Bouamama, considéré comme un résistant algérien, était un marocain de Figuig. En 1903, notre ville a été bombardée car nous servions de base arrière aux tribus locales algériennes contre l’arrivée des Français. Nos arrières grands-parents ont du payer une amende de 60000 francs pour leur participation à la résistance algérienne. Dans les années 60, les Figuigiens ont déraillé des trains pour les résistants algériens qui étaient emmenés à Bechar. »

Aussi, la pilule a du mal à passer. Depuis la guerre des sables, la ville de Figuig ne cesse de perdre des territoires. « Nous avons perdu jusqu’à 50% de nos terres depuis les années 70. Il y a un problème entre le Maroc et l’Algérie, soit  ! Mais nous, nous sommes au milieu. S’il y a un grand exode rural à Figuig vers le Maroc ou l’étranger, il est dû à ces dépossessions de terres. Ils auraient pu faire de belles choses à Figuig même. Cela bride les investissements. Figuig était sur la route du sel vers le Niger ou Tombouctou. Dorénavant, c’est un cul-de-sac. »

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Des questions de droit de la propriété privée en suspens

Au centre des revendications des Figuigiens sur El Arja, la question juridique prévaut. Les terres d’El Arja se retrouvent directement liées à la convention relative au tracé de la frontière entre le Maroc et l’Algérie de 1972. Les habitants ne comprennent pas pourquoi ils ont pu investir ses territoires, sans être sous souveraineté marocaine.  En effet, si les Figuigiens ont bien les documents attestant la propriété de ces terres, celles-ci se trouvent bien sur le sol algérien, selon la convention. « La question juridique est essentielle, souligne Mounir Jamai. Est-ce que des propriétaires terriens le restent si celles-ci passent sous une autre autorité étatique ? Un collectif d’avocats va tacher de faire valoir le droit international. »

Mounir Jamai estime que les frontaliers sont les dommages collatéraux de ce qui se passe entre Rabat et Alger. « Ceux qui habitent, comme nous que ce soit d’Oujda à Figuig, sont les premiers à subir la fermeture des frontières entre les deux pays. Cela est préjudiciable aux deux peuples.«