La fin d’un monde
Le directeur de la rédaction revient en juillet 2018 sur les transformations du monde engendré par Donald Trump
Selon les interprétations, l’Antéchrist peut désigner un individu – souvent monstrueux –, parfois un groupe et ou encore un personnage collectif. Aujourd’hui, il prend le visage d’un trio qui, s’il n’est pas capable de précipiter la fin du monde, va assurément acter la fin d’un monde, de ce monde.
Au sommet de la pyramide, on retrouve Donald Trump. Le Président américain ne respecte même plus ses fidèles alliés (à la figure desquels il jette le compromis du G7 à peine signé), roule dans la farine l’accord de Paris sur le climat, impose des droits de douane unilatéralement en contradiction avec toutes les lois de l’Organisation mondiale du commerce, se retire allègrement de l’Unesco, menace d’appuyer sur le bouton nucléaire, tweete les insultes les plus triviales sur “les pays de m…”. Cerise sur le gâteau, l’ami Trump n’a pas hésité à transférer, envers et contre tous, son ambassade à Jérusalem. Qu’importe le nombre de morts palestiniens, qu’importe le climat de guerre qui prévaut désormais dans la région.
Trois gourous aux commandes
Le second personnage de la trilogie n’est autre que ce faucon de Benyamin Netanyahou, qui a fait plus de mal à la nation juive de par son intransigeance que tous les Oussama Ben Laden réunis. Avec le Premier ministre israélien, le nombre de morts palestiniens au kilomètre carré a explosé et le reste est à l’avenant.
Reste le petit de la bande, tout aussi dangereux : Mohamed Ben Salmane. Le prince héritier d’Arabie saoudite peut se targuer d’avoir réduit en quelques années tout un pays à l’état de spectre. Plus de 10 000 morts et 8,5 millions de personnes sont menacées de famine, de choléra et même de la peste dans le Yémen voisin.
Alors que le monde regarde, impuissant, leurs frasques et leur vampirisme insatiable, ces gourous marquent des points et trouvent grâce aux yeux de leurs disciples. On craignait la fin du monde, le regard fixé sur les pandémies, le dérèglement climatique ou encore les pénuries alimentaires, mais il semble que ces trois personnages, unis pour le meilleur et surtout pour le pire, en ont décidé autrement.
La disparition de la civilisation occidentale
Donald Trump sera le fossoyeur de l’Occident, qui est désormais le théâtre de diverses divisions, de fractures sociales et de dislocations politiques. Les civilisations sont mortelles mais, une chose est sûre, la disparition de la civilisation occidentale ne viendra pas de ces hordes de musulmans qui font si peur aux nationalistes. Même si l’aversion de Trump pour l’Islam vient aussi du fait qu’il sert l’agenda des évangélistes qui l’ont élu. En effet, depuis son arrivée à la Maison Blanche, ses gestes envers ces derniers se sont multipliés, à commencer par la signature d’un ordre exécutif “pour la liberté religieuse et d’expression”.
Pour ce qui est du sioniste en chef, la chose est entendue : si quelqu’un est prêt à appuyer sur le bouton nucléaire pour raser l’Iran et les Palestiniens en même temps, c’est bien lui. Peu importe si les juifs eux-mêmes y laissent des plumes.
Et dans le registre mention très bien, Ben Salmane a signé l’acte de décès d’un monde arabe moribond, en faisant la guerre à ses voisins les plus immédiats et en prenant en otage un petit pays, le Qatar. On peut également lui décerner une Palme d’or pour avoir instrumentalisé l’Islam, en remplaçant l’obscurantisme wahhabite par une version encore plus folklorique de la religion.