Edito. Tartarin de Tarascon

Photo par ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP
Faut-il avoir peur de Donald Trump ? La réponse à cette question est à chercher dans les innombrables articles de presse et autres interviews de responsables politiques de tous les camps, y compris dans celui des républicains qui ont pourtant voté Trump.
Du New York Times au Washington Post en passant par la presse européenne, toutes les analyses s’accordent à reconnaître, au pire que Trump est fou à lier et, au mieux, que ses déclarations incroyables sont à prendre pour ce qu’elles sont : des coups d’épée dans l’eau sans conséquences et qui ne font que noircir la réputation des États-Unis dans le monde.
Malheureusement, quand tout le monde est d’accord sur le caractère absurde de s’emparer de Gaza en procédant au nettoyage ethnique des populations palestiniennes, à contrario, dans le monde arabe, la presse et les youtubeurs les plus en vogue sont en mode panique, servant un narratif tout à fait contraire, à savoir que les pays arabes se démènent pour échapper à la corvée de recevoir chacun son paquet de Palestiniens, livrés avec les « meilleurs vœux de Mister Trump et du Dr Netanyahou ».
Entre parenthèses, les observateurs avertis ont bien souligné la déférence et la servilité du président américain quand il a reçu le Premier ministre israélien, chaleureusement accueilli par Donald Trump à la Maison-Blanche le 4 février.
De toutes les façons, dès sa prise de fonction à la présidence des États-Unis, Donald Trump a marqué la politique américaine par un style de gouvernance inhabituel, une facilité à créer la polémique, aussi bien sur le plan national qu’international.
Après avoir essuyé plus de 90 chefs d’accusation dans quatre procès, l’ancien magnat de l’immobilier ne pense plus qu’à se venger, aussi bien de ses adversaires internes que de ses ennemis extérieurs.
Élu contre les choix légitimes de pouvoirs élus, le populiste en chef est à la fois le symptôme d’une détresse populaire et l’expression de solutions alternatives. Ces millions d’Américains qui ont le sentiment d’être abandonnés par les « puissants », l’élite, les médias, une classe politique corrompue, boucs émissaires commodes de leurs malheurs.
Paradoxalement, c’est un Trump, symbole de la toute-puissance de l’argent, qui se propose de sortir les États-Unis du déclassement avéré de la nation américaine.
Le populisme est un écran noir qu’alimentent les peurs du lendemain, que ce soit le chômage, l’insécurité, l’immigration ou l’islam. Appeler Trump pour faire face à la clochardisation des pauvres, à la paupérisation de l’État.
C’est dans ce grand chambardement de la modernité que la plèbe, ferment du populisme, compte sur le nouveau venu pour franchir le Rubicon d’une gouvernance crédible.
En bref, Trump cultive une idéologie de la peur où l’anthropophobie n’est pas étrangère. Dans cette idéologie, l’homme est le mal (s’il est musulman, c’est encore plus vrai) et il faut le punir, l’empêcher de nuire.
Le chef de l’État se croit ainsi investi d’une mission : traquer les contrevenants. À coups de déclarations tonitruantes, il espère ainsi étouffer les velléités de liberté, bâillonner les voix de la raison et désespérer la hiérarchie morale.
Faisant sien le narratif sioniste de « eux, c’est les méchants humains » et « nous, la démocratie, la liberté, le camp du bien ».
Malgré le fait qu’il soit à la tête d’un pays qui a le triste privilège de collectionner le plus de morts au kilomètre carré sur le globe, il n’est en réalité ni plus, ni moins qu’une pâle copie de ce Tartarin de Tarascon, ce farouche tueur « imaginaire » de lions qui se prenait pour le meilleur des chasseurs alors que son unique trophée, c’est d’avoir réussi à tirer sur une casquette.
En cela, le personnage d’Alphonse Daudet est très représentatif d’un esprit bravache qui a oublié que l’adversaire, surtout quand il est palestinien, se sent bien dans la peau du lion.
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