Economie Africaine : Comment redynamiser après le Covid-19 ?

 Economie Africaine : Comment redynamiser après le Covid-19 ?

Karim Hajji et Michel Abrougoua

Lors d’un débat de haute tenue sur l’économie africaine, organisé par le Centre d’étude et de prospective stratégique (CEPS), Karim Hajji, ancien président de l’association des bourses francophones d’Afrique et Michel Abrougoua, président du CA de Phoenix Capital Management, ont pu argumenter sur ce qu’il convient de faire. Rôle de l’Etat, mesures prises, actions publiques et privés, Europe, etc..

Les webinars se suivent et ne se ressemblent pas. Celui organisé par le CEPS aura eu le mérite de rentrer dans le vif du sujet. Avec deux intervenants de haut standing, la question de la relance de l’économie africaine est au centre d’un débat passionnant. Actions à mener, décisions publiques et privés, rôle des banques, etc… Les intervenants ont pu développer des exemples concrets lors d’une conférence vidéo, animée par Loic Tribot LaSpère.

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Une économie africaine chahutée en besoins de financements

Pour Michel Abrougoua, l’Afrique a souffert du coronavirus. Elle concerne autant l’offre et la demande. « L’économie africaine dépend des exportations. Il y a eu un gros déséquilibre de nos finances publiques. Les recettes proviennent des exportations. Le PIB Africain qu’on escomptait à 3-4%, risque d’être négatif, de l’ordre de -3% »

Chômage, crise majeure, économie en berne. Le président du CA de Phoenix Capital Management avertit sur la crainte d’une crise sociale. Pour lui, il faut donner une priorité à des « moratoires pour que le service de la dette puisse soutenir l’économie africaine. » La mobilisation auprès des institutions internationales est importante aussi. « Il convient de passer d’améliorer la valeur locale plutôt que de l’envoi de matières premières brutes. » Un point sur lequel Karim Hajji, ancien président des bourses francophones d’Afrique convient. » Il convient de le faire pour le continent comme le Maroc l’a fait pour le phosphates. L’OCP réalise 5 milliards de dollars alors qu’on ne faisait qu’1 milliard de dollars dans le passé. Elle pourrait être décliné. Le Nigéria, qui est exportateur de pétrole, importe des produits raffinés »

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50 milliards d’euros de produits agricoles importés par l’Afrique

Pour Karim Hajji, le coronavirus épargne le continent (sur le taux de mortalité). Les Etats ont plutôt bien réagis en interrompant les liaisons aériennes et en mettant en oeuvre des pratiques de confinement.

Reprenant un argument de Michel Abrougoua sur les difficultés d’importations alimentaires (notamment du riz), l’ancien président de la bourse de Casablanca affirme que les pays africains importent « 50 milliards d’euros de produits agricoles. Nous avons tout ce qu’il faut pour nourrir l’Afrique. Il faut s’interroger sur notre manière de consommer en Afrique. »

Pour Karim Hajji, il faut des infrastructures (énergie, transports, routes, etc..). Cet état de fait empêche le commerce intra régional. « le taux d’investissement n’est que 15,5%. C’est le continent le moins intégré économiquement. »

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« C’est à l’Etat que revient la relance de l’économie africaine »

Pour Michel Abrougroua, l’Etat a un rôle prépondérant dans la relance économique. « Il faut amplifier les organisations régionales. Il faut une stratégie d’industrialisation avec une complémentarité entre les pays africains. »

Un point de vue que partage Karim Hajji, qui pense que « les Etats auront un rôle majeur dans la relance de l’économie africaine. Ils doivent impulser la relance par l’investissement public. Il convient aussi de développer des partenariats public privé (PPP), notamment sur les questions énergétiques. »

Les plans sectoriels au Maroc comme au Gabon, peuvent proposer des relances économiques sectoriels. Il faut entre 130 et 150 milliards de dollars par an. « Les 2/3 des exportations vont vers l’Europe. Nos partenaires sont touchés. C’est un cercle vicieux. »

Pour Karim Hajji, le développement des masques et des respirateurs artificiels sont la preuve que « l’Afrique doit faire confiance à l’Afrique. L’Afirque a les capacités pour faire face à ce genre de crise. »

« La monarchie a du bon »

Pour l’ancien président de la bourse de Casablanca, le secteur privé va prendre sa part, ‘notamment dans les cliniques privés car l’Etat n’a pas les capacités pour tout construire. Pareil dans l’éducation ! »

Sur la réflexion du modèle de développement, Karim Hajji a indiqué qu’une commission présidée par Chakib Benmoussa a été étendue après la crise du covid 19. « La monarchie a du bon. C’est grâce à son pouvoir fédérateur que des gens différents réfléchissent à un nouveau modèle. »

Enfin, pour Michel Abrougoua, la crise sanitaire repose « les questions de la mondialisation et de ses questions d’approvisionnement. Pour les pays africains, des efforts ont été faits. Les fonds ont été mis en place par l’Etat et l’accompagnement régional. Il n’y a pas eu assez d’investissement dans les plateformes sociales. »