Cancer : au Maroc, une mobilisation sans précédent
Depuis la création de la Fondation Lalla Salma, en 2005, la lutte contre le cancer au Maroc est devenue une priorité de santé publique. Les actions se multiplient dans les domaines de la sensibilisation, de la prévention, de la détection précoce et de l’accès aux soins.
MAGAZINE NOVEMBRE 2017
Au Maroc, le cancer ne fait plus peur. Son approche a changé. Que ce soit sur le plan médical ou psychologique. Cette (r)évolution des mentalités, on la doit en grande partie au combat inlassable de la princesse Lalla Salma et de la Fondation à laquelle elle a donné son nom, née en 2005. Avant, seuls deux centres d’oncologie datant du protectorat existaient alors dans le pays, à Rabat et Casablanca. Aujourd’hui, on en compte une vingtaine, ainsi que sept Maisons de vie.
De nombreuses campagnes de sensibilisation
Equipés des dernières technologies (notamment des accélérateurs permettant de traiter plus rapidement les patients), ces centres qui ont déjà soigné 200 000 patients, disposent d’unités de chimiothérapie, de radiothérapie et d’hospitalisation, ainsi que d’un hôpital de jour. Désormais, un programme de dépistage systématique des cancers du col de l’utérus permet de réduire les conséquences souvent dramatiques d’une prise en charge tardive. La philosophie de la Fondation ? Œuvrer pour le bien-être et le confort du patient. Mais aussi dédramatiser la maladie, un mal tabou, qu’on qualifie ici de “al mard el khayeb” (le mal maudit). Pour changer les mentalités, la Fondation mène un grand nombre de campagnes de sensibilisation (affiches, dépliants, spots TV et radio…) privilégiant la darija (le dialecte marocain) pour mieux toucher la population.
De généreux donateurs
Sur le site internet de l’institution, on peut visionner des dizaines de spots montrant des femmes parlant à cœur ouvert de leur maladie (cancer du sein) et incitant au dépistage. Des hommes parlent face caméra de leur cancer du poumon et du mal causé par le tabac. Selon l’Organisation mondiale de la santé, 7 millions de personnes meurent chaque année du tabagisme dans le monde et 890 000 de tabagisme passif. Faire de la prévention contre la cigarette au Maroc n’est pas une chose facile. Certes, la Fondation donne l’exemple via ses campagnes de sensibilisation… mais dans les faits ? La cigarette est toujours admise dans les lieux publics ou les cafés. Une loi a pourtant été votée en 2008 par le Parlement, mais elle n’a jamais été publiée au Bulletin officiel. Elle prévoyait une amende de 10 à 50 dirhams (entre 1 et 5 euros) pour “toute personne qui fume du tabac ou des produits du tabac dans les lieux où il est interdit de fumer”. Des sanctions très faibles pour ne pas dire ridicules. Si cette loi tarde à voir le jour, c’est à cause des conflits qu’elle peut créer. Une armada de forces de l’ordre devrait être mise sur pied pour veiller au respect de la loi, sans parler du lobbying des entreprises de tabac désireux de sauvegarder leurs intérêts.
Les fonds alloués à la Fondation proviennent souvent de donateurs. Ainsi, lors du dîner de gala célébrant les 10 ans de l’institution, en octobre 2015, la princesse Lalla Salma a réussi à collecter la jolie somme de 180 millions de dirhams (16 millions d’euros) grâce à une vente aux enchères. Les mécènes sont les plus grandes entreprises du Royaume (SNI, BMCE, Akwa, BMCI, Banque Populaire, CDG, Maroc Telecom ou encore l’OCP). Sans oublier les particuliers, comme l’émir du Koweït, Sabah Al Ahmad Al Jaber Al Sabah, qui a fait un don de 2 millions de dollars (1,7 million d’euros) en 2009, ou des organismes étrangers, tels que la Fondation Hôpitaux de Paris, présidée par Bernadette Chirac.
Aujourd’hui, la Fondation Lalla Salma coopère activement avec des institutions et des associations basées dans 14 pays du continent africain, de la Mauritanie au Sénégal, en passant par le Mali, le Cameroun, le Burkina Faso ou encore la Côte d’Ivoire.
Chiffres clés :
Selon une étude sur l’incidence du cancer au Maroc en 2014, menée par l’Organisation mondiale de la santé, le cancer du sein arrive en tête chez les femmes avec 6 650 cas, suivi de celui du col de l’utérus (2 258 cas). Quant aux hommes, ils sont principalement atteints de cancers du poumon (3 497 cas) ou de la prostate (2 332 cas)
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