Dissolution du CCIF : Le Syndicat des avocats de France dénonce une atteinte à la démocratie
Par décret du 2 décembre 2020, le Président de la République a prononcé la dissolution du Collectif contre l’islamophobie en France. Avant cela, le ministre de l’Intérieur n’avait pas caché son hostilité envers l’association qu’il accusait d’être une « officine islamiste œuvrant contre la République ». En l’absence de preuves tangibles, le Syndicat des avocats de France dénonce « un délit d’opinion » et une « atteinte grave aux libertés publiques ».
L’exécutif a prononcé la dissolution du CCIF sur le fondement de l’article L 212-1 du Code de sécurité intérieure. Ce texte prévoit en effet la dissolution d’une association qui se rendrait coupable de la provocation à la discrimination, à la haine, à la violence ou à des actes de terrorisme.
Or, « la lecture du décret de dissolution démontre que le gouvernement sanctionne en réalité un délit d’opinion », s’indigne le Syndicat des avocats de France (SAF) dans un communiqué. Selon lui, le gouvernement sanctionne en réalité une association qui « dénonçait le caractère discriminatoire des mesures législatives pour prévenir ou combattre le terrorisme ». Un travail de vigilance qualifié d’incitation au terrorisme dans le discours officiel.
Gérald Darmanin avait annoncé le 19 novembre avoir notifié à ses responsables la dissolution du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). Il l’accusait, quelques jours après l’assassinat de Samuel Paty, d’être une « officine islamiste œuvrant contre la République ».
L’association a de son côté officiellement contesté cette dissolution et porté plainte contre le ministre. Elle a également déplacé une partie de ses activités pour continuer son action à partir de l’étranger.
« Dérive mortifère »
« Le raccourci fait entre critique des politiques de l’État et provocation au terrorisme fait froid dans le dos », s’inquiète le SAF. Selon ces juristes, la liberté d’expression implique « la faculté de contester l’état du droit, l’action politique ». Leur dénonciation de cette dissolution est par ailleurs renforcée par le fait « qu’aucune poursuite pénale n’a jamais été engagée contre l’association ».
Le syndicat rappelle que la lutte contre le terrorisme ne doit pas « porter atteinte à la liberté d’expression de toutes celles et ceux qui luttent contre les discriminations ». Il défend également le droit à défendre les libertés individuelles et à dénoncer les états d’urgences permanents et la surveillance généralisée.
La voie dans laquelle avance le gouvernement actuel fait planer le même risque de dissolution pour « de nombreuses associations, syndicats ou partis politiques », ajoutent les avocats. Concluant que le « SAF continuera à s’opposer à cette dérive mortifère pour les libertés publiques ».