Couples, éducation, discrimination : Un portrait de la France de la diversité
Une vaste étude éclaire les trajectoires familiales, scolaires et professionnelles de trois générations d’immigrés en France. Ses résultats donnent à voir une France à l’aise avec sa diversité et battent en brèche certaines idées reçues dans un pays où un tiers de la population de moins de 60 ans a des origines hors de l’Hexagone.
L’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) et l’Institut national d’études démographiques (INED) ont rendu publics les premiers résultats de la seconde enquête Trajectoires et Origines (TeO2) sur la diversité en France. Une étude menée entre juillet 2019 et novembre 2020 sur un échantillon représentatif de 27.200 personnes de 18 à 59 ans. La première étude avait eu lieu onze ans auparavant.
21% de la population française est liée à l’immigration. Dans le détail, 9% de la population française est immigrée (5,8 millions de personnes). 12% (7,5 millions) a un au moins parent ayant immigré en France. En outre, 10% des moins de 60 ans sont des petits-enfants d’immigrés (4,7 millions). Au total, un tiers des personnes de moins de 60 ans ont un lien avec l’immigration sur trois générations, soulignent les instituts.
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Les immigrés sont particulièrement importants dans les classes d’âge 20-45 ans (15% des 40-44 ans), car beaucoup arrivent en France lorsqu’ils sont en âge de travailler. Il y a en a peu parmi les moins de 18 ans (3%). Dans la deuxième génération à l’inverse, les descendants d’immigrés sont très représentés chez les mineurs (20%), contre 11% des 18-59 ans et 7% des plus de 60 ans.
Une intégration plus ou moins rapide selon l’origine
Les chiffres reflètent l’histoire les flux d’immigration aux XXe et XXIe siècles. Dans la deuxième génération d’immigrés, deux tiers des mineurs sont d’origine africaine. A l’inverse, 90% des descendants d’immigrés de plus de 60 ans sont d’origine européenne. Outre ce tableau d’ensemble, l’Insee et l’Ined donnent à voir le nuancier des destins des personnes issues de l’immigration au travers du couple.
Ainsi, l’étude relève une progression des unions mixtes au fil des générations. 63% des immigrés vivent en couple avec un immigré. La proportion s’inverse à la deuxième génération avec 66% de couple avec des personnes sans ascendance migratoire. Il y a toutefois un écart important en fonction de l’origine. 78% des personnes originaires d’Europe du Sud sont en union mixte alors que ce n’est le cas que de 39% de celles d’origine maghrébine.
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En raison de cette mixité des unions, l’intensité du lien à l’immigration décroît au fil des générations. La moitié des immigrés de seconde génération sont issus de couples mixtes. Mais, seuls 90% des immigrés de la troisième génération n’ont qu’un seul ou deux grands-parents immigrés.
Un bon parcours scolaire, mais des difficultés à l’embauche
Les parcours scolaires ont également été scrutés pour étudier l’impact des origines. Il en ressort que les 30-59 ans issus de couples mixtes (41%) et petits-enfants d’immigrés (44%) sont aussi souvent diplômés (bac+2 et plus) du supérieur que « les descendant de natifs » (43%). C’est en revanche moins le cas des enfants de deux parents d’immigrés (33%). Car leurs parents avaient en moyenne un niveau d’étude plus bas que dans les autres catégories.
Toutefois, ce sont ces enfants de deux parents immigrés qui « accomplissent la distance la plus importante ». Plus de 70% obtiennent un diplôme plus élevé que celui de leurs parents, contre 55 à 57% des autres enfants. Dans les familles originaires du Maghreb et d’Europe du sud, seulement 3% des parents ont un diplôme du supérieur. Mais, il y a une « forte mobilisation des parents immigrés en faveur de la réussite scolaire des enfants », relève l’étude.
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Il demeure que les diplômés du supérieur nés de parents d’origine extra-européenne ont plus de difficulté à accéder à des professions intermédiaires ou supérieures. 77 % des Français sans ascendance migratoire occupent ce type de profession, contre seulement 71 % des sondés d’origine africaine ou même 63 % des jeunes originaires du Maghreb.
Les données de l’Insee et de l’Ined montrent également le nombre de personnes en France déclarant avoir subi des discriminations a augmenté de 14% à 19% en onze ans. Le premier motif de discrimination est l’origine (nationalité ou couleur de peau) pour 8% d’entre elles. Mais, le sexe est désormais le premier motif de discrimination pour les femmes (10%).