Cop 29 : Le pari « vert »de l’Azerbaïdjan
Des hydrocarbures aux énergies renouvelables ! Après la COP28 qui s’est tenue aux Émirats arabes unis en décembre dernier, l’Azerbaïdjan a été désigné comme hôte du sommet sur le climat COP29 en novembre prochain après des négociations difficiles. Le docteur en sciences politiques et chercheur en géopolitique, Sébastien Boussois revient dans sa tribune, sur la transformation en cours du géant pétrolier d’Asie Centrale.
Azerbaïdjan pour la COP29 et Brésil pour la COP30. Deux des plus importants producteurs de pétrole au monde donc. Pourquoi c’est une chance pour ces pays et pour nous ? Car dans le même temps, ils sont souvent en quête urgente d’alternatives énergétiques et poussent la diversification de leur économie dans le sens des énergies vertes. Depuis quatre mois maintenant, Bakou s’agite en coulisses pour promouvoir son action et accueillir le monde entier dans sept mois.
Selon les règles de l’ONU, c’était au tour de l’Europe de l’Est de prendre la présidence tournante, mais les groupes doivent décider à l’unanimité du pays hôte. La Russie avait bloqué les pays de l’UE, de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie qui bloquaient mutuellement les offres. Les participants commençaient à s’inquiéter de savoir si un pays serait en mesure de réunir l’argent et les installations nécessaires pour accueillir une conférence d’une telle envergure. Mais l’Arménie a retiré sa candidature et a accepté de soutenir l’Azerbaïdjan.
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Inquiétude des militants du climat
Les militants du climat réagissent déjà avec inquiétude à cette nouvelle. Quel est leur argument principal ? Car l’économie du pays du Caucase dépend énormément à ce jour encore des exportations de pétrole et de gaz. L’Azerbaïdjan est un pays de 10 millions d’habitants situé à la frontière de l’Europe de l’Est et de l’Asie occidentale et dépend économiquement des combustibles fossiles : la production de pétrole et de gaz a représenté près de la moitié du PIB de l’Azerbaïdjan et plus de 92,5 % de ses revenus d’exportation l’année dernière. Le pays dispose d’environ 2 500 milliards de mètres cubes de réserves de gaz naturel, selon le BP Statistical Review of World Energy 2021. Même si les émissions liées au réchauffement climatique liées à la combustion du gaz naturel sont inférieures à celles du charbon ou du pétrole, elles restent bien supérieures à celles des sources d’énergie vertes.
Dans un discours prononcé en décembre dernier à la COP28 à Dubaï, le ministre azerbaïdjanais de l’Écologie et des Ressources naturelles, Mukhtar Babayev, a déclaré que l’Azerbaïdjan était « pleinement engagé à contribuer aux efforts mondiaux » pour atténuer le changement climatique. Par ailleurs, il a ajouté que l’Azerbaïdjan avait pour objectif d’augmenter la part de l’électricité produite à partir de sources renouvelables à 30 % d’ici 2030. C’est donc un processus long mais en marche.
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Créer une « zone neutre en carbone » d’ici 2050
Babayev a également suggéré que l’Azerbaïdjan ferait des territoires en reconstruction une « zone neutre en carbone » d’ici 2050, faisant référence aux zones situées au Karabah. Il a suggéré que cela se ferait grâce au recours à l’agriculture durable, aux transports respectueux de l’environnement, aux villes intelligentes, et au reboisement. L’objectif est de fournir à la région une énergie verte respectueuse de l’environnement en utilisant le fort potentiel d’énergie renouvelable existant dans les territoires libérés et de formuler des propositions en étudiant les perspectives d’application de technologies vertes respectueuses de l’environnement et économes en énergie. A cet effet, des modèles de demande énergétique dans les zones évoquées ont été développés en utilisant différents scénarios. D’autres projets sont en cours dans la « zone d’énergie verte » : production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, mesures d’efficacité énergétique, utilisation de véhicules électriques, installation d’installations d’énergie renouvelable (notamment des panneaux solaires) sur les toits des bâtiments, utilisation de lampes LED à base d’énergie solaire dans l’éclairage des rues et des routes, l’utilisation de technologies d’énergies renouvelables dans le chauffage, le refroidissement et l’approvisionnement en eau chaude, l’application d’une gestion intelligente de l’énergie, etc.
Dès décembre dernier, et avant même l’annonce de la future Cop29, la société d’état de production d’hydrocarbures SOCAR annonçait la création d’une unité d’énergies vertes appelée « SOCAR green » et destinée à promouvoir les investissements dans les projets d’énergie solaire, éolien, d’hydrogène verte, et de capture et stockage de CO2[2], dans de nombreuses régions du pays. Les climatologues affirment que l’augmentation de la production de gaz naturel apparaît comme l’un des principaux moteurs du changement climatique et pourrait paralyser les efforts visant à limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius au-dessus des niveaux préindustriels. Mais si l’on intègre pas les pays producteurs en transition, comment pourrait-on régler cette question ? C’est comme dans une négociation diplomatique : pour faire la paix, les deux parties doivent évidemment être présentes. Cela évitera à terme de continuer de présenter les producteurs comme les grands méchants loups, alors que ces pays-là produisent avant tout pour nous !
La candidature de l’Azerbaïdjan a reçu l’approbation de près de 200 pays, dont l’Arménie, adversaire de longue date, qui a récemment accepté les principes fondamentaux du traité de paix après des décennies de conflit. Par ailleurs, les membres de la COP28 ont aussi choisi l’hôte du sommet programmé en 2025 : ce sera le Brésil pour la Cop30. On l’a vu avec la visite récente du Président Macron en Guyane et au Brésil : l’Amazonie est au cœur de toutes les attentions. Le président Lula souhaite ainsi accueillir la conférence en Amazonie, une région particulièrement touchée par le changement climatique et la déforestation, mettant en danger depuis des décennies le fameux « poumon de la Terre ».