Comité d’éthique de la police municipale : les policiers réagissent
A la suite de notre article sur la création d’un Comité d’éthique de la police municipale, nous avons reçu une réaction de Jean-Louis Del Pistoia, le directeur national de la communication de l’Union syndicale professionnelle des policiers municipaux. Considérant que les points soulevés par ce courrier méritent d’être soumis à l’opinion publique, nous avons décidé de le publier en intégralité.
Il s’agit en fait d’un courrier qui avait été adressé le 20 janvier 2022 à Jacques Toubon, l’ancien Défenseur des droits et ex-ministre de la Justice sous Jacques Chirac qui assure la présidence de ce comité d’éthique :
« Par la présente nous entendons vous féliciter pour votre désignation en qualité de Président du Comité d’Éthique de la Police Municipale de la Ville de Paris par Madame le Maire, bien que nous ne voyons aucun intérêt à la mise en œuvre d’une telle instance dont l’indépendance est discutable, la répression disciplinaire permettant aux Maires depuis toujours de garantir aux citoyens l’application des règles en ce domaine par les policiers municipaux et tout autre fonctionnaire.
Par ailleurs, Monsieur le Ministre de l’Intérieur peut désormais, sans au préalable s’enquérir de l’avis de la Commission Consultative des Polices Municipales, décider du contrôle par les services de l’IGPN d’un service de Police Municipale.
Toutefois, vous en conviendrez en votre qualité d’ancien Ministre de la justice et garde des sceaux qu’il importe que la loi soit appliquée par tous sans distinction aucune quel que soit son rang. Force est de constater que bien souvent notre organisation syndicale est conduite, ce au moyen de la saisine des juges administratifs, de saisir la justice pour de très nombreux détournements de la loi qui sont le fait non pas des policiers municipaux mais de leurs employeurs publics.
La liste des communes condamnées est assurément assez édifiante sur ce point (WATRELOS, RAMBOUILLET, DIJON, VERSAILLES, LILLE, DUNKERQUE, CALAIS, PERPIGNAN, SAINT DENIS, CARPENTRAS, SOISY SOUS MONTMORENCY, REMIRE MONTJOLY, AVIGNON, MEAUX etc.) et d’autres sans doute qui devraient venir rallonger cette liste non exhaustive.
Nous en voulons pour seul exemple les milliers de fonctionnaires qui par des subterfuges grossiers sont détournés quotidiennement de leurs champs de compétences par les Maires, des fonctionnaires qui sont gravement ainsi exposés à des risques qui ne sont pas les leurs assurément, trompant même par ce moyen leurs administrés avec toutes les conséquences de droit sur le plan pénal que cela pourrait engendrer.
Des élus locaux qui viendront sans aucun scrupule comme ils savent si bien le faire verser des sceaux de larmes, prononcer de belles oraisons funèbres avec la mine de circonstance, le dépôt de breloques sur un cercueil masquant ainsi ce que pourraient être leurs propres responsabilités. Si en votre qualité de Défenseur des Droits vous vous êtes opposé avec vos raisons à l’usage du LBD par les forces de l’ordre, qui s’est soucié Monsieur le Président de l’exposition par les maires des Policiers Municipaux très nombreux à être les victimes de violences ?
Qui ? Sans doute pas le Défenseur des Droits bien que la sécurité au travail soit un droit garanti par notre constitution. Ces policiers sans disposer parfois d’aucun moyen de défenses sont déployés pour renforcer la sécurité des lieux de cultes sous une menace terroriste évidente et reconnue par la mise en place de plan VIGIPIRATE renforcé.
Qui pourrait prétendre qu’à Paris les policiers municipaux ne seraient pas ou ne pourraient pas être exposés à la violence de la délinquance, de la criminalité, du terrorisme ou à la simple folie des hommes alors que leur mission relève de la sécurité publique ?
Seule l’utopie du monde politique pourrait le soutenir, la réalité est à Paris manifestement tout autre, en témoigne les récents événements.
Est-il besoin de vous rappeler qu’à Montrouge Monsieur le Président, Clarissa a perdu la vie sacrifiée sur l’autel de la bêtise politique ? Elle qui non seulement n’aura pas pu espérer un temps sauver sa vie, n’aura même pas pu un temps espérer empêcher un sinistre individu de poursuivre sa route meurtrière et d’abattre quatre innocentes victimes.
C’est cela, Monsieur le Président la réalité, loin des dogmes politiques et de l’utopie d’universitaires qui n’ont jamais eu à faire à la violence qu’ils ne connaissent qu’au travers de statistiques ou au travers de ce qu’ils ont pu en lire dans la presse. Les policiers municipaux, eux, y sont confrontés quotidiennement.
Ainsi s’il a pu paraître louable à Madame HIDALGO de mettre en œuvre un tel Comité avec la liberté que lui garantit l’article 71 de la Constitution (ce que nous n’entendons pas lui contester), il nous paraît tout aussi important que celle-ci respecte le statut de la Police Municipale.
Les normes imposées par les textes en matière de tenue, d’équipements, de carte professionnelle et au-delà les règles de recrutement dans la fonction publique territoriale ne nous étant pas parues respectées, nous avons saisi monsieur le Préfet.
Afficher la prétention de vouloir contrôler les autres pouvant apparaître pour une nécessité, passe nécessairement par le respect de la loi par soi-même, l’exemple venu de plus haut ayant sans aucun doute, Monsieur le Président ses vertus. »
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