Cinéma. « De nos frères blessés » sort Fernand Iveton de l’anonymat
Qui connaît l’histoire de Fernand Iveton, militant communiste, engagé dans la lutte pour l’indépendance de l’Algérie et exécuté par l’Etat français le 11 février 1957 à Alger ? Avec « De nos frères blessés » sorti mercredi 23 mars, avec Vincent Lacoste dans le rôle principal, le réalisateur Hélier Cisterne sort de l’anonymat le seul européen guillotiné pendant la guerre d’Algérie.
Fernand Iveton est ouvrier à l’EGA (Électricité et Gaz d’Algérie). Il vit à Alger avec Hélène, une Polonaise, rencontrée lors d’un séjour à Paris et qui accepte de le suivre en Algérie.
Indépendantiste convaincu, Fernand Iveton adhère en 1955 au mouvement des Combattants de la libération créé par les communistes algériens, puis rejoint le FLN (Front de Libération National), deux organisations interdites par l’Etat français, car considérées comme terroristes.
Désireux d’en faire plus pour la lutte pour l’indépendance de l’Algérie, Fernand Iveton dépose le 14 novembre 1956 une bombe dans un local désaffecté de son usine, loin des habitations. Le militant ne veut tuer personne, il cherche juste à provoquer une gigantesque panne d’électricité pour plonger dans le noir Alger. D’ailleurs, la bombe a été programmée pour exploser à 19h30, après que le personnel de l’usine soit rentré chez lui.
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Dénoncé par un de ses chefs qui le voit pénétrer dans le local un sac à la main, il sera arrêté le soir même, puis incarcéré à la prison de Barberousse à Alger, après avoir été torturé au commissariat.
Dix jours après son arrestation, après un simulacre de procès, une seule journée d’audience !, un avocat commis d’office qui fera le minimum, Fernand Iveton sera condamné à mort malgré l’absence de victimes.
« De nos frères blessés » met également en lumière une formidable histoire d’amour entre Fernand Iveton et Hélène sa femme, la seule à essayer de remuer ciel et terre pour sauver son mari de l’échafaud.
Les autres, le parti communiste français en tête, mais aussi les intellectuels de l’époque, regardèrent à côté. Sans oublier le rôle de François Mitterrand, et au-delà de la gauche alors au pouvoir, incapable d’accorder la grâce à un homme qui n’avait tué personne au final. Une gauche responsable de l’exécution de dizaines de militants politiques algériens.
Même si « De nos frères blessés » n’arrive pas vraiment à restituer toute la violence politique de l’époque, il n’en reste pas moins un film essentiel qui permet encore une fois de bien montrer la cruauté de la guerre d’Algérie.
Un film qui tombe à point nommé alors que viennent d’être célébrés les 60 ans des accords d’Évian qui marquent la fin de ce conflit.
A voir absolument.