Cadmium : Le royaume parie sur des phosphates plus propres
À qui profite le crime ? C’est un peu la question qui vient tout de suite à l’esprit quand on visionne « Pain, fruits, légumes : révélations sur un nouveau scandale », diffusé dimanche 26 janvier sur la chaîne de télévision française M6. Le « suspect » ? Le cadmium, un métal lourd réputé dangereux pour l’environnement et la santé publique.
Sans prendre de gants, le reportage pointe du doigt les engrais phosphatés du Maroc, à qui l’on impute (contre toute logique) une teneur élevée en cadmium, affirmant sans sourciller que les engrais phosphatés provenant du Maroc sont « naturellement très chargés en cadmium ».
Or, malheureusement pour la chaîne française, la teneur en cadmium dans les engrais en provenance du Maroc n’est non seulement pas du tout élevée, mais bien au contraire, les engrais marocains présentent l’une des plus faibles teneurs en ce métal.
En effet, depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, tous les engrais phosphatés exportés par l’OCP vers le marché européen contiennent une teneur en cadmium inférieure à 20 mg/kg, respectant ainsi la limite fixée par la réglementation européenne entrée en vigueur en 2022 (Règlement européen (UE) 2019/1009), qui fixe la teneur maximale en cadmium des engrais phosphatés à 60 mg/kg.
À cet égard, les engrais phosphatés exportés par le Maroc vers la France sont étiquetés « faible teneur en cadmium » et restent conformes aux recommandations de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), évoquées pourtant dans le reportage.
D’autant plus que l’Hexagone n’a pas besoin des engrais provenant du Maroc pour mettre en danger la vie de ses citoyens, au point où le deuxième Plan national santé environnement (2009-2013) avait inscrit dans ses objectifs une réduction des émissions atmosphériques industrielles de cadmium, plomb, benzène, dioxine et chlorure de vinyle monomère, comprise entre 50 et 85 %.
Dès lors, on peut se poser la question du timing de la diffusion de ce documentaire. Dans un contexte de guerre économique marqué par le tour de vis protectionniste américain, les géants du phosphate que sont l’OCP, le groupe russe Phosagro, l’Américain Mosaic et la société saoudienne Ma’aden se livrent un bras de fer commercial pour s’approprier l’essentiel des parts de marché.
Dans cette configuration, l’OCP, qui s’est distingué ces dernières années autant par un saut qualitatif suite à son virage du début des années 2000 que par son ouverture sur la recherche scientifique, est en train de caracoler en tête. Et cela ne lui apporte pas que des bénéfices.