Baisse notable des mouvements de protestation en Tunisie : autoritarisme ou résignation ?

 Baisse notable des mouvements de protestation en Tunisie : autoritarisme ou résignation ?

Selon le dernier rapport du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES), les manifestations et autres mouvements sociaux en Tunisie ont diminué de plus de moitié en 2023 par rapport à 2022, année où la contestation était déjà en nette baisse par rapport à 2021, année où le président Kais Saïed s’était octroyé les pleins pouvoirs. Que faut-il en déduire ?

Edifiants, les derniers chiffres du FTDES, révélés par son porte-parole Romdhane Ben Amor, indiquent que d’environ 12 mille mouvements de protestation en 2021, le pays est passé à près de 7000 en 2022, à un étonnant « un peu plus de 3400 seulement » durant l’année écoulée de 2023. « Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette dégringolade. Manifester est d’abord quelque chose de sain en démocratie où l’acte de protestation connaît généralement une recrudescence dans les climats respectueux des droits fondamentaux dont celui de la contestation sociale », rappelle Ben Amor.

Or, selon le FTDES, on ne saurait expliquer ce recul dans les manifs en l’occurrence par une amélioration en parallèle de la situation socio-économique des Tunisiens, si l’on se fie aux sources y compris officielles telles que l’INS notamment quant aux indicateurs de l’inflation.

 

Centralisation et désespoir

Pour Romdhane Ben Amor, la conscience acquise par les principaux acteurs sociaux que les décisions sont désormais prises par un seul homme explique que l’essentiel des protestations est désormais focalisé sur la capitale Tunis et Carthage, où se concentre la totalité du pouvoir. La démoralisation consécutive à l’inanité de l’action contestataire expliquant le reste d’après la même source. Rappelons également la relégation au second plan du rôle des corps intermédiaires traditionnels tels que les syndicats, les partis politiques et la société civile qui encadraient jadis les mouvements de rue mais sont depuis exclus du dialogue politique aujourd’hui inexistant.

Cependant ces chiffres du recul des sit-ins et des mouvements sociaux font l’objet d’une prévisible récupération politique par les partisans du pouvoir en Tunisie. Ainsi le député Thabet el Abed a expliqué ce qu’il qualifie de paix sociale par une confiance en hausse des Tunisiens en la personne de Kais Saïed.

En dépit de cette baisse continue de ces manifestations, le gouvernorat de Gafsa conserve par ailleurs la première place à l’échelle nationale, enregistrant 107 mouvements au cours du dernier trimestre 2023, tandis que le gouvernorat de Tunis arrive en solide deuxième position, avec 105 manifestations de rue ces mêmes trois derniers mois.

Les établissements éducatifs ont en outre occupé la première place dans le classement des lieux de protestation, en accueillant 140 mouvements au cours du dernier trimestre de 2023, celui de la rentrée, suivis par les médias avec 93 mouvements, et la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) qui a connu une légère accalmie par rapport aux précédents mois. Des protestations qui portent principalement sur les revendications financières, les droits des travailleurs, ainsi que la régularisation de la situation professionnelle des enseignants suppléants.

 

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