Attentat de Nice : La communauté musulmane redoute les amalgames

 Attentat de Nice : La communauté musulmane redoute les amalgames

Basilique Notre-Dame de l’Assomption de Nice. Crédit photo : Nadir Dendoune

Déjà, en juillet 2016, quelques jours après l’attentat survenu sur la Promenade des Anglais, Hanane, 35 ans, assistante notaire dans le centre ville de Nice (06), avait « senti une pression sur son lieu de travail ».
Dans son cabinet, la trentenaire est la seule à être de confession musulmane. « Je n’avais pas aimé certaines remarques de mes collègues. J’avais l’impression qu’ils me tenaient en partie responsable de la folie de cet homme », raconte-t-elle. Malgré elle, Hanane s’était tout de même sentie obligée de se « désolidariser publiquement du terroriste ». Elle en garde un souvenir amer.
Le 14 juillet 2016, soir de fête nationale, le terroriste Mohamed Lahouaiej Bouhlel avait fauché avec son camion 84 innocents comme des quilles sur la Promenade des Anglais.
Quatre ans plus tard, ce jeudi 29 octobre, un autre terroriste, Brahim Issaoui, armé d’un couteau, a tué de nouveau à Nice, cette fois-ci dans l’église Notre-Dame de l’Assomption.
Trois personnes, deux femmes, une sexagénaire et une quadragénaire de nationalité brésilienne, et le sacristain de la basilique, un homme de 55 ans, sont morts.
« Ce matin (NDLR lundi 2 novembre), après quelques jours de repos, j’ai repris le travail et de nouveau, j’ai senti une ambiance lourde, comme il y a quatre ans », se désole Hanane.
« Une collègue m’a demandé ce que je pensais de l’attentat. J’ai coupé court en lui disant que ce n’était pas le lieu pour en parler. Cette fois-ci, je ne céderai pas à la pression. Je n’ai pas à me sentir coupable, je suis une citoyenne française à part entière. Je n’ai pas à me désolidariser de ce terroriste puisque je n’ai jamais été solidaire des terroristes », insiste-t-elle.
A l’heure du déjeuner, Hanane rejoint Rachida, une amie, caissière dans une supérette. « Je pense sérieusement à enlever mon voile parce que j’ai peur un jour de me faire agresser, commence-t-elle sérieusement. Vendredi, quelqu’un est passé devant moi en voiture et m’a traité de « sale bougnoule » », témoigne inquiète Rachida.
« A chaque attentat d’un extrémiste musulman à Nice ou ailleurs en France, c’est le même refrain », regrette de son côté Hanane.
Un peu plus loin, à l’est de la ville, coincé entre les voies rapides et la gare de marchandises de Saint-Roch, le quartier des Abattoirs où vivait Mohamed Lahouaiej Bouhlel, « le tueur de la Promenade des Anglais».
Mourad, 55 ans, discute devant une boulangerie avec son ami Ahmed, sensiblement du même âge que lui.
« Comme en 2016, les journalistes viennent nous harceler ici dans notre quartier pour nous demander ce qu’on pense des attentats », peste Mourad. « Par contre, quand il s’agit de venir ici pour parler des choses positives qui ont lieu dans le quartier, y a plus personne ! », fulmine le quinquagénaire.
« Est-ce qu’on condamne l’attentat de l’église ? A part les tarés et les extrémistes, vous ne trouverez pas une personne ici pour légitimer ces actes monstrueux », rappelle Ahmed. « Aujourd’hui, comme en 2016, on doit se justifier, c’est ça qui fait mal. C’est vraiment vexant, c’est pesant », déplore Mourad.
Les deux quinquagénaires aimeraient juste que la communauté musulmane n’ait pas à « payer pour les actes d’un déséquilibré qui ne représente que lui-même ». « Nous ne sommes comptables que de nos actes et même si ces terroristes se revendiquent de notre religion, nous n’avons rien à avoir avec eux », martèlent les deux amis. « Et puis, vous savez ? ces barbares tuent en majorité des musulmans. Nous sommes donc tous concernés », conclut Mourad.
Basilique Notre-Dame de l'Assomption.
Notre-Dame de l’Assomption de Nice. Photo : Nadir Dendoune
Basilique Notre-Dame de l’Assomption de Nice.
Basilique Notre-Dame de l’Assomption de Nice. Crédit photo : Nadir Dendoune
Basilique Notre-Dame de l’Assomption. de Nice.
Basilique Notre-Dame de l’Assomption de Nice. Crédit photo : Nadir Dendoune