Allemagne : vaste opération de police visant un réseau d’extrême droite préparant un coup d’État
Une vaste opération au sein de groupuscules d’extrême droite et complotistes en Allemagne a conduit mercredi au démantèlement d’une cellule projetant des attaques armées. Ces dernières visaient notamment le Bundestag, le parlement allemand, a indiqué le parquet.
Les forces de l’ordre ont interpellé 25 personnes. Elles sont notamment soupçonnées « d’avoir fait des préparatifs concrets pour pénétrer violemment dans le Bundestag allemand », la chambre des députés à Berlin, « avec un petit groupe armé », ont déclaré les procureurs dans un communiqué. « Nous soupçonnons qu’une attaque armée contre les organes constitutionnels était prévue », a commenté le ministre de la Justice, Marco Buschmann, dans un message sur Twitter.
Quelque 3 000 policiers ont participé à cette opération à travers l’Allemagne. Les autorités ont ainsi mené plus de 130 perquisitions dans ce que les médias ont décrit comme la plus importante opération de ce type de l’histoire du pays. Outre les interpellations, 27 autres personnes sont visées par l’enquête et soupçonnées d’appartenance à la cellule criminelle, selon le parquet. Une arrestation a eu lieu en Autriche et une autre en Italie.
Un prince, un colonel et une juge
Parmi les suspects que les médias ont identifiés, quelques personnalités se distinguent. Le Prince Reuss, descendant d’une lignée de souverains de l’État régional de Thuringe, en ferait partie. La police a également perquisitionné son château près de Bad Lobenstein, dans le centre du pays.
Le communiqué du ministère de la Justice mentionne également une Russe, compagne du prince. Elle aurait servi d’intermédiaire pour tenter de prendre contact avec les autorités russes en vue d’un éventuel soutien. Toutefois, l’ambassade russe à Berlin a démenti tout lien avec des organisations « terroristes » ou « illégales » en Allemagne.
Le groupe de suspects compte également un ancien lieutenant-colonel de l’armée allemande dans ses rangs. Ce commandant d’un bataillon de parachutistes dans les années 1990 est fondateur d’un commando d’Unité des forces spéciales (KSK). Il a dû quitter l’armée allemande à la fin des années 1990 après avoir enfreint la loi sur les armes.
Également arrêtée, une certaine « Birgit M.-W. ». Il s’agirait d’après la presse allemande de Birgit Malsack-Winkemann. Cette juge et ancienne députée du parti d’extrême droite AFD siégeait au Bundestag entre 2017 et 2021.
Mouvance structurée et radicalisée
Fondé « au plus tard fin 2021 », le groupuscule avait « pour objectif de venir à bout de l’ordre étatique existant en Allemagne et de le remplacer par une forme d’État propre », un projet ne pouvant être réalisé « que par l’utilisation de moyens militaires et de la violence contre les représentants de l’État », selon le communiqué du parquet de Karlsruhe, en charge des affaires concernant la sécurité de l’État.
Ses membres sont « unis par un profond rejet des institutions de l’État et de l’ordre fondamental libéral et démocratique de la République fédérale d’Allemagne, qui a fait grandir chez eux, au fil du temps, la décision de participer à leur élimination par la violence et de se lancer dans des actes préparatoires concrets à cet effet », décryptent les procureurs.
Les autorités allemandes ont classé ces dernières années la violence d’extrême droite au premier rang des menaces à l’ordre public, avant le risque djihadiste. Au printemps, elles avaient démantelé un autre groupuscule d’extrême droite soupçonné d’avoir projeté des attentats dans le pays et l’enlèvement du ministre de la Santé, à l’origine des mesures de restriction anti-Covid.
Dans son projet d’éliminer l’ordre démocratique, ce réseau était « conscient qu’il y aura aussi des morts ». « Une étape intermédiaire (…) nécessaire » pour atteindre le « changement de système ». La justice dit avoir identifié une organisation très structurée et hiérarchisée composée d’un « organe central » et d’un « bras militaire » chargé de l’achat d’équipements de l’entraînement aux armes du recrutement, mais aussi de commissions « Justice », « Affaires étrangères » ou « Santé ».