Agressions à Cologne : les demandeurs d’asile craignent l’amalgame
La nuit de la Saint-Sylvestre s'est transformée en cauchemar à Cologne, lorsque des groupes d'hommes en bande et décrits comme « arabes » ou « nord-africains » s'en sont pris aux femmes aux abords de la cathédrale et de la gare. Le porte-parole du ministère fédéral de l'Intérieur a annoncé que la police effectuait des vérifications sur 31 « suspects » au total, dont 18 demandeurs d'asile, sans toutefois faire le lien avec les violences de Cologne.
120 plaintes en quelques heures
La police a reçu plus de 120 plaintes pour agressions sexuelles ou des vols, parfois les deux à la fois. Au-delà des attouchements, deux femmes auraient été victimes de viols caractérisés. À moins grande échelle, des faits similaires ont eu lieu à Hambourg (nord) et Stuttgart (sud). Les autorités locales n'ont aucune preuve à ce stade de l'implication de réfugiés, et nombre de responsables appellent à éviter les amalgames. Mais, certains en Allemagne font le lien alors que le pays a accueilli 1,1 million de demandeurs d'asile en 2015.
Le ministère de l’Intérieur a fait état vendredi lors d'un point de presse à Berlin « de 31 suspects, dont les noms sont désormais identifiés, dont 18 ont le statut de demandeur d'asile », soupçonnés de vols et de violences physiques. Toutefois, il n'a pas évoqué de suspects concernant les agressions sexuelles ni mentionné d'interpellations à ce stade.
« Notre première réaction a été : maintenant, les Allemands vont nous détester », confie Asim Vllaznim, lorsqu'il évoque le moment où lui et sa famille ont découvert l'ampleur des agressions du Nouvel An à Cologne, devant leur vieille télévision cathodique. « C'est une honte ce qu'ils ont fait à la gare centrale », s'indigne ce Kosovar de 32 ans, dans la chambre d'un foyer de demandeurs d'asile de la métropole rhénane (ouest), où il reçoit en proposant le thé.
Merkel sous pression
« Ce ne sont pas de bonnes nouvelles pour Merkel », soupire M. Vllaznim. Ce père de cinq enfants a foi en la chancelière et son « wir schaffen das » (« nous réussirons ») qu'elle a martelé aux Allemands, lorsque l'afflux de réfugiés a commencé à inquiéter. Mais, il sait que « Mama Merkel » est sous pression.
« Je remercie les Allemands de nous avoir accueillis. Je voudrais leur dire de ne pas avoir peur », reprend le Kosovar, à Cologne depuis un an et demi. Fatigué des discriminations dont sont victimes les Ashkalis, la minorité ethnique à laquelle sa famille appartient, il a quitté les Balkans avec l'espoir que ses enfants grandiront en Allemagne.
Inquiétude et colère des demandeurs d’asile
« Dans toutes les cultures, il y a des gens qui se comportent mal », soupire une Bosniaque de 36 ans, qui souhaite garder l'anonymat. « Il ne faut pas mettre tous les réfugiés dans le même sac », lance-t-il. Cologne héberge actuellement 10 150 demandeurs d’asile pour une population d’un million d'habitants. « Ce serait vraiment super si on savait de qui il s'agit, pour qu'on arrête les coupables et qu'on les renvoie chez eux, peu importe de quel pays ils viennent », lâche Rute Graca, 42 ans, sur le chemin du travail.
La méfiance menace des deux côtés, constate cette mère de deux filles. Musulmane, elle ne porte plus son foulard depuis quelques mois et ne quitte plus le centre passé 16 h. La faute aux incendies volontaires d'hébergements de réfugiés et aux agressions qui émaillent régulièrement l'actualité allemande.
Rached Cherif
(Avec AFP)