Algérie : Un site gazier rejette un puissant gaz à effet de serre depuis 40 ans
Depuis près de 40 ans, un site gazier en Algérie émet du méthane dans l’atmosphère, un puissant gaz à effet de serre. Une révélation de Greenpeace qui intervient alors que l’Europe cherche désespérément à importer du gaz. Mais aussi à faire pression sur les exportateurs pour limiter leur impact sur l’environnement.
Sur le plus grand champ gazier d’Algérie, une installation rejette un puissant gaz à effet de serre dans l’atmosphère depuis près de 40 ans. La station de compression, qui aide à pomper le gaz du champ Hassi R’Mel vers l’Europe, libère en effet régulièrement du méthane depuis au moins 1984.
C’est ce que révèle une nouvelle recherche satellitaire que révèle Unearthed, le site d’information de l’ONG Greenpeace. Ces données satellitaires montrent que les fuites de méthane se sont poursuivies au moins jusqu’au 5 novembre 2021. Selon l’étude, il s’agit d’une fosse où l’exploitant brûle les produits qu’il ne valorise pas. Il s’agit du même procédé que celui de bruler les hydrocarbures au moyen d’une torche dont le panache est caractéristique des sites d’extraction ou de raffinage. Or, le gaz ventilé (non torché) est un gaz 84 fois plus puissant que le CO2 qui résulterait de son torchage.
Dilemme pour l’Europe
Ces révélations surviennent alors que l’UE cherche à augmenter ses importations de gaz en provenance d’Algérie. L’Europe cherche en effet à réduire sa dépendance au gaz russe en réaction à l’invasion de l’Ukraine par celle-ci. Dans le contexte de la flambée du gaz, l’UE cherche également à renforcer les contrôles sur les fuites de méthane au sein du bloc et auprès des principaux exportateurs.
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Le méthane est un puissant gaz à effet de serre et un déclencheur clé du changement climatique. Mettre fin aux fuites dans le secteur pétrolier et gazier constituerait un pas important pour ralentir le dérèglement du climat. Ce pourrait aussi être une source supplémentaire d’énergie, le méthane étant un gaz naturel exploitable.
Sur 384 observations entre 2017 et mars 2022, les satellites ont détecté des pics d’émission de méthane à 188 reprises. Ils ont également mesuré que les panaches étaient les plus intenses entre 2017 et 2020. De 1984 à 2017 – une période où la qualité des données satellitaires était limitée, rendant les fuites plus difficiles à voir – il y a eu 35 jours où des panaches de méthane ont pu être repérés. Les chercheurs précisent que plusieurs autres sites algériens émettent massivement du méthane. Tout comme les industries pétrolière et gazière dans nombre de pays.
Mauvaise volonté d’Alger
Le plus fort taux d’émission remonte au 21 novembre 2021 avec un rejet d’environ 4,5 tonnes par heure. Au total, les auteurs de l’étude estiment que Hassi R’Mel a émis 939 000 tonnes de méthane en 2021. Soit une hausse de 67% sur un an, selon une étude de l’agence Bloomberg. À titre de comparaison, les émissions de méthane l’année dernière sont équivalentes à celle de 17 millions de voitures américaines, selon la même enquête.
Si elle n’est pas la seule à rejeter massivement du méthane dans l’atmosphère, l’industrie algérienne des hydrocarbures fait preuve de mauvaise volonté pour agir sur la question. Le pays n’a pas voulu s’engager dans des initiatives visant à réduire ces émissions nocives pour le climat. Lors de la récente conférence des Nations Unies sur le climat à Glasgow, Alger a refusé de se joindre à 105 autres pays pour signer un engagement à réduire les émissions de méthane de 30 % d’ici 2030.