Nouvelle crispation entre Alger et Paris ?

 Nouvelle crispation entre Alger et Paris ?

Bernard Emié


 


A trois jours de la visite de Manuel Valls en Algérie, l’ambassadeur de France en Algérie, Bernard Emié, a été convoqué hier par le ministre algérien des Affaires étrangères pour protester contre "la campagne de désinformation" menée par la presse française. 


 


L’affaire "Panama papers" n’a pas fini de déteindre sur la relation algéro-française. La publication de la photo de Bouteflika aux côtés d’autres chefs d’Etats cités dans cette affaire à la Une du journal français Le Monde a fait sortir de ses gonds le gouvernement  algérien qui, jusqu’ici, s’est muré dans un silence assourdissant  alors qu’un de ses membres, Abdeslam Bouchouareb en l’occurrence, en a été éclaboussé. 


L’ambassadeur de France en Algérie, Bernard Emié, a été convoqué hier par le ministre algérien des Affaires étrangères RamtaneLamamra pour lui signifier sa désapprobation. « Le ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, RamtaneLamamra, a élevé, mercredi, une protestation énergique auprès de l'ambassadeur de France, Bernard Emie, qui a été convoqué au siège du ministère des Affaires étrangères suite à la campagne de presse, hostile à l'Algérie et à ses institutions, menée en France dans différents médias et à travers d'autres activités publiques », a indiqué le ministère algérien des Affaires étrangères dans un communiqué.


Pour le chef de la diplomatie algérienne, « ladite campagne malveillante et fallacieuse -que l'invocation de la liberté de la presse ne saurait aucunement justifier- a atteint son paroxysme avec des manipulations diffamatoires délibérément dirigées contre l'institution présidentielle ».


Aujourd’hui, c’est au tour du ministre de l’Intérieur et des Collectivités, Badoui, d’en rajouter une couche. « Les institutions algériennes constituent une ligne rouge et nous devons les défendre. On n’acceptera jamais une atteinte à nos symboles et à nos institutions », a-t-il déclaré.


Pourtant, le journal du soir Le Monde a publié, dans son édition demercredi 06 avril, une précision en assurant que  « contrairement à ce que la photo en "une" du Monde du 5 avril a pu laisser croire, le nom du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, n’apparaît pas dans les Panama papers. Ce sont des proches du chef de l’Etat qui sont soupçonnés d’avoir détourné une partie des ressources du pays, comme le relevait notre article sur l’affaire Sonatrach ».


Aussi, il y a lieu de se demander les vraies motivations de ces sorties musclées  de deux membres du gouvernement algérien en l’espace d’une journée à peine.  Il se peut que les autorités algériennes cherchent  à détourner le regard des Algériens sur l’implication avérée dans cette affaire d’un ministre réputé proche du clan présidentiel et qui, selon le journal arabophone El Hayat d’aujourd’hui, aurait  fait part de sa disposition à démissionner de son poste.


Mais tout porte à croire que les dirigeants algériens ont exploité à dessein cette "bévue" du journal français  qui n’est pourtant pas un canal officiel pour faire pression sur le gouvernement français. On susurre çà et là, qu’Alger a mal digéré le fait que la France se soit rangée du côté du Maroc dans l’affaire du Sahara.


Reste à connaitre  jusqu’où peut aller cette fronde algérienne et si la lune de miel entre Bouteflika et Hollande est bel et bien consommée.


Yacine Ouchikh