Les réserves en devise de l’Algérie s’érodent à vue d’œil
De 200 milliards de dollars, les réserves de change de l’Algérie sont retombées à 151 milliards et descendront à 121 milliards de dollars à fin 2016 !
Jouissant pendant longtemps d’une embellie financière exceptionnelle, l’Algérie retombe à nouveau dans la disette. En mois de deux ans, le pays voit ses réserves en devise fondre comme neige au soleil. Et les perspectives sont des plus sombres : les recettes continueront de chuter, tandis que les réserves de change s’éroderont davantage. C’est ce qu’a expliqué en tout cas le ministre des Finances, dimanche 22 novembre, à l’Assemblée populaire nationale (APN), lors de la présentation du projet de loi de finances 2016.
« La conjoncture n’est pas facile. En 2016, les recettes pétrolières atteindront 26,4 milliards de dollars contre 33, 8 milliards à la clôture de l’année en cours », avoue-t-il devant les députés, très remontés contre « le méga-échec de la gouvernance du pouvoir Bouteflika ».
Ayant frôlé la barre des 200 milliards de dollars en 2013, les réserves de change de l’Algérie atteindront un niveau très bas à la fin de l’année 2016 avec 121 milliards de dollars, soit moins de 30 milliards par rapport à l’année en cours (151 milliards de dollars). Malgré cette situation alarmante, le ministre des Finances tente de rassurer les Algériens.
« Les 121 milliards de dollars couvriront largement les importations de l’Algérie pendant 23 mois. Certains diront que c’est rien, moi je dirais que c’est beaucoup quand on sait que des pays ont seulement de quoi couvrir deux à trois mois d’importations », dit-il.
Et à Benkhalfa de détailler ensuite les mesures prises pour éviter au pays une éventuelle faillite, tout en maintenant la politique sociale du gouvernement qui compte consacrer 1840 milliards de DA pour les transferts sociaux en 2016.
« La révision à la baisse du budget d’équipement ne va pas affecter la dynamique de la croissance. Le gouvernement opte pour une gestion vigilante, prudentielle sans réprimer le niveau de croissance », rassure M. Bennkhalfa, précisant également que les augmentations des prix de l’énergie, notamment l’électricité, ne concerneront pas les couches défavorisées. « 10 millions d’Algériens ne seront pas touchés par ces augmentations », affirme-t-il.
Les députés sceptiques
Les assurances du grand argentier du pays n’ont pas convaincu les députés qui ont entamé les débats autour de ce projet. Selon Ahmed Betatache, la crise économique dure depuis 1962. « Le problème du pays réside dans l’absence d’une stratégie de développement global. Si on n’a pas réussi à sortir de la dépendance aux hydrocarbures, en 54 ans d’indépendance, est-il possible de diversifier notre économie en deux ans ?», s’interroge-t-il.
De son côté, l’élu du Parti des travailleurs, Ramdane Taazibt, estime que le gouvernement « veut appauvrir le citoyen et enrichir les riches ». « C’est un projet de loi destiné aux riches et qui remet en cause les acquis sociaux », estime-t-il, dénonçant l’attitude « arrogante du ministre des Finances qui n’écoute personne ». « C’est une loi de la honte », clame le député indépendant, Habib Zagad, qui ira jusqu’à parler de « mise au pas de l’institution parlementaire ».
Yacine Ouchikh