Bouteflika dégomme le général Toufik

 Bouteflika dégomme le général Toufik

Le président algérien Bouteflika (D) limoge


 


La nouvelle a fait l’effet d’une bombe dans le microcosme algérois et emballé les réseaux sociaux ! Après un règne long de 25 ans à la tête des Services algériens, l’énigmatique général Toufik, faiseur de présidents et l’homme le plus puissant d’Algérie, se voit signifier la porte de sortie. 


 


« Conformément aux dispositions des articles 77 (alinéas 1 et 8) et 78 (alinéa 2) de la Constitution, Monsieur Abdelaziz Bouteflika, président de la République, ministre de la Défense nationale, a mis fin, ce 13 septembre, aux fonctions de chef du Département du Renseignement et de la Sécurité, exercées par le général de corps d'armée, Mohamed Mediene, admis à la retraite », a annoncé hier la Présidence algérienne dans un communiqué laconique.


« Le président de la République a nommé M. Athmane Tartag, chef du Département du Renseignement et de la Sécurité, ajoute la même source. M. Athmane Tartag, général-major à la retraite, était jusqu'à ce jour conseiller auprès du président de la République. Auparavant, il avait assumé plusieurs hautes responsabilités au sein des services de renseignement et de sécurité », a-t-elle ajouté.


La chute de l’homme le plus craint d’Algérie est-elle pour autant une surprise ? Non. Les coups de boutoirs menés par le clan présidentiel depuis l’été 2013 contre les Services et leur chef et l’absence de toute réaction de ce dernier préfigurent une telle issue. A son retour du Val-de-Grâce où il a été admis en avril 2013, le président s’est  résolument employé à "émasculer" le DRS en le dépouillant de l’essentiel de ses prérogatives avec à la clé le limogeage de ses principaux hommes (Bachir Tartag, M’henna Djebbar,  le colonel Fawzi, etc).


Simultanément, une attaque frontale contre le patron du DRS lui-même, menée par le sulfureux secrétaire général du FLN, Amar Saadani. A peine la parenthèse de l’élection présidentielle que l’assaut est à nouveau donné. Résultat en cet été 2015 : le rattachement des derniers pouvoirs du DRS à l’état-major de l’Armée et de la dissolution pure et simple de la force de frappe de corps,  le fameux GIS, et la mise en écrou du général Hassan, un autre fidèle de Mediene. La messe est alors dite et les jours de Toufik étaient bel et bien comptés.  


Et depuis hier, le mythe Toufik s’est écroulé. La nomination à la tête d’un DRS totalement affaibli de Bachir Tartag, ancien bras droit de Toufik, permettra-t-elle au général déchu de garder une once de son influence passée? Pas évident. Bachir Tartag a été nommé à la tête précisément parce qu’il était en froid avec son ancien chef mais aussi pour services rendus au clan présidentiel qu’il a rejoint au lendemain de sa mise à la retraite en juillet 2014.


Une chose est sûre, la fin de Toufik signe la fin d’une époque mais surtout la victoire de Bouteflika dans sa guerre d’usure contre celui qui a personnifie la dernière poche de résistance à son pouvoir absolu. Désormais, le chef de l’Etat n’est plus un ¾ de président et a la mainmise sur tout le pays, son appareil sécuritaire y compris.


Question : que fera maintenant Bouteflika ? Il n’est pas exclu qu’il effectuera d’autres réglages au sein de l’Armée en remerciant, par exemple, le chef d’Et-major Gaid Salah même si jusqu’ici ce dernier lui a été d’un grand apport dans sa guerre contre Toufik, pour nommer quelqu’un de moins vieux mais de très sûr. Ce n’est qu’après qu’il s’attaquera à l’essentiel: décider de sa succession à sa convenance, voire, à sa guise.


D’aucuns diront qu’un grand boulevard s’ouvre désormais devant le frère cadet et conseille spécial du président.


Yacine Ouchikh