Abaissement de la note souveraine : la Tunisie renégocie ses dettes

 Abaissement de la note souveraine : la Tunisie renégocie ses dettes

La Tunisie a une fois de plus fait l’objet d’une dégradation de sa note souveraine par l’agence Moody’s. L’agence de notation américaine vient d’abaisser la notation souveraine du pays de B2 à B3, tout en maintenant les perspectives de cette notation à « négatives ».

Réagissant à cette sévère mais prévisible dégradation, l’économiste Mahmoud Sami Nabi a déclaré que Moody’s a justifié cet abaissement de la note à B3 essentiellement par la faiblesse de la gouvernance face à la montée des contraintes sociales qui inhibent les marges de manœuvre du gouvernement. En cause également, l’incapacité des pouvoirs publics à réduire le déficit budgétaire et réaliser les réformes du secteur public.

 

L’instabilité politique, principal responsable

« Ces réformes, jugées nécessaires pour stabiliser ou limiter l’augmentation de la dette extérieure, nécessitent un consensus entre les institutions et la société civile sur l’orientation à prendre et les modes d’intervention… Un accord qui, dans les meilleurs des cas, risque de prendre beaucoup de temps », explique le rapport de Moody’s.

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Autre justification présentée par l’agence : « le retard pris par les négociations avec le FMI qui augmente l’incertitude quant à la capacité du gouvernement à lever les ressources financières extérieures planifiées, à des coûts raisonnables ».

Selon Nabi, la première répercussion liée à cette dégradation sera le renchérissement du coût du financement sur les marchés financiers internationaux où la loi de finances de 2021 a prévu 10 milliards de dinars notamment sous forme d’émission obligataires.

Avec un grade spéculatif B3, les taux d’intérêt vont sans doute grimper à plus de 10%. Afin de réduire la prime de risque, il est attendu que les autorités tunisiennes activent leurs relations bilatérales et multilatérales, pour avoir le maximum de garanties souveraines.

Par ailleurs cette nouvelle notation dégrade davantage encore l’attractivité de la destination Tunisie pour les investissements directs étrangers et risque de nuire aux opérateurs économiques tunisiens lors de leurs opérations commerciales avec leurs partenaires étrangers, a-t-il déploré.

Une dégradation devrait donc mettre davantage de pression pour un sursaut national en vue d’accélérer le déclenchement d’un dialogue social national entre toutes les parties prenantes autour des réformes économiques.

 

Vers le report du remboursement de certaines dettes ?

En 2021, la Tunisie aura à rembourser de gros montants, deux prêts garantis par les Etats-Unis d’Amérique d’un montant global d’1 milliard de dollars, mais aussi d’autres prêts accordés par la France, l’Italie, le Qatar et l’Arabie Saoudite.

Afin de réduire les pressions de ces remboursements sur les finances publiques, l’ancien ministre du Développement et de la Coopération internationale Selim Azzabi, avait entrepris des démarches pour négocier le report ou le rééchelonnement de crédits contractés auprès de ces pays. Des efforts restés inachevés avec le départ du gouvernement Fakhfakh.

Le rapporteur de la Commission parlementaire des finances, de la planification et du développement au Parlement, Fayçal Derbal, a récemment recommandé au gouvernement Mechichi de reprendre ces négociations.

Cruciale, la question du rééchelonnement de la dette fut au centre de l’entretien qu’a eu le 23 février dernier Ali Kôoli, ministre des Finances, de l’Economie et de l’Appui à l’investissement, avec Saad Ben Naceur Hamidi, ambassadeur du Qatar à Tunis.