Un soldat franco-israélien poursuivi pour torture envers des Palestiniens
Le 17 décembre 2024, une nouvelle plainte a été déposée en France à l’encontre d’un soldat franco-israélien, accusé de torture, de crimes de guerre et de complicité dans des actes de déshumanisation à l’encontre de prisonniers palestiniens.
Cette action en justice intervient après la diffusion d’une vidéo sur les réseaux sociaux, qui a profondément choqué l’opinion publique et alimenté les débats sur la responsabilité des ressortissants français dans les violations des droits humains commises dans le cadre du conflit israélo-palestinien.
Un soldat franco-israélien filmant des scènes de torture
La plainte, déposée par la Fédération Internationale pour les Droits Humains (FIDH) et plusieurs associations palestiniennes, dont Al-Haq et Al Mezan Center, repose sur une vidéo filmée par le soldat franco-israélien.
Dans la séquence, on voit un homme entravé, les yeux bandés et à moitié dévêtu, entouré de soldats israéliens. La scène se déroule dans des conditions humiliantes, tandis qu’une voix, identifiée comme celle du soldat, se moque de la victime et parle de tortures infligées pour « le faire parler ». Le soldat filme et commente les actes de violence, qualifiant la situation de « rigolote », tout en insultant les prisonniers.
« Tu as vu ce fils de pute, il s’est pissé dessus. Je vais te montrer son dos, tu vas rigoler. Ils l’ont torturé pour le faire parler », déclare la voix. Cette vidéo, qui dure moins d’une minute, a été largement partagée sur les réseaux sociaux, devenant rapidement virale et suscitant une vive indignation. Le Quai d’Orsay a qualifié cette vidéo d’« abjecte et choquante ».
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La dénonciation d’une politique systématique de torture
La plainte va au-delà de l’acte individuel du soldat. Les associations de défense des droits humains mettent en avant un système de torture systématique mené par l’armée israélienne dans la bande de Gaza, qui implique des sévices physiques et psychologiques sur des prisonniers, y compris des enfants.
Clémence Bectarte, avocate à la FIDH, a déclaré : « Les témoignages collectés directement à Gaza, auprès de victimes rescapées, nous montrent que ces actes sont répétés de manière systématique. Cela inclut l’utilisation de mineurs, des enfants arrêtés et soumis aux mêmes actes de torture. » Selon l’avocate, les actes de torture sont « intentionnels » et visent à « déshumaniser » et « nier la dignité humaine » des prisonniers palestiniens.
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Une justice française sollicitée face à l’inertie du PNAT
Ce n’est pas la première plainte déposée contre ce soldat. Une première plainte « contre X » avait été classée en septembre 2024 par le Parquet national antiterroriste (PNAT), qui estimait que les éléments apportés n’étaient pas suffisants pour établir la complicité de torture.
Cependant, cette nouvelle plainte, déposée avec constitution de partie civile, permet de saisir un juge d’instruction et de relancer l’enquête, malgré l’avis négatif du PNAT. Selon les plaignants, cette procédure permet de « combattre l’inertie du parquet », qui n’a pas jugé utile de poursuivre l’affaire précédemment.
Les organisations de défense des droits humains insistent sur l’urgence d’une enquête sérieuse, étant donné les graves accusations qui pèsent sur ce soldat, mais aussi sur le contexte plus large des violences commises par l’armée israélienne. « Il est urgent que la France enquête, poursuive et punisse ses ressortissants impliqués dans des crimes internationaux », a déclaré Shawan Jabarin, directeur général de l’association Al-Haq.
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La position de la France : Une évolution nécessaire ?
Au début du conflit, la diplomatie française était réticente à s’attaquer aux agissements des ressortissants français engagés dans l’armée israélienne. Le porte-parole adjoint du Quai d’Orsay, Christophe Lemoine, avait déclaré en mars 2024 : « La binationalité, c’est une double allégeance. On n’enquêtera pas sur ce que feront les Franco-Israéliens vis-à-vis de leurs obligations militaires en Israël. »
Cependant, à la lumière de la viralité de la vidéo et des pressions internationales, la position de la France semble avoir évolué. En mars, le même porte-parole a précisé que « la justice française est compétente pour connaître de crimes commis par des ressortissants français à l’étranger ».
Les avocats des plaignants soulignent que, bien que la France ne puisse pas directement juger des actions des soldats israéliens en Israël ou à Gaza, elle a une obligation juridique de poursuivre ses ressortissants impliqués dans des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité.
Johann Soufi, avocat spécialisé en droit international, rappelle : « La participation à un crime de guerre ou à un crime contre l’humanité ne se limite pas à commettre un meurtre ou un acte de torture. La complicité dans ces crimes, même par la simple participation à des actes de déshumanisation ou en filmant des scènes de torture, est un crime en soi. »
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Une réponse nécessaire à une violence systémique
La plainte contre ce soldat s’inscrit dans un cadre plus large de dénonciation des actes de violence systématique à Gaza. Les avocats des plaignants ont fait état de preuves documentées de rafles violentes et de mauvais traitements infligés aux Palestiniens par les forces israéliennes.
Selon eux, la torture et les humiliations infligées aux détenus palestiniens sont considérées comme légitimes par une partie de la société israélienne, conséquence d’une campagne de déshumanisation des Palestiniens.
Les associations de défense des droits humains appellent la communauté internationale à exercer des pressions sur les gouvernements concernés pour mettre fin à ces pratiques et garantir que justice soit rendue. Les autorités françaises, de leur côté, sont désormais sous pression pour enquêter sur les actes de leurs ressortissants impliqués dans des violations des droits humains dans le cadre de ce conflit.