Le régime algérien orchestre une purge au sein de l’intelligentsia
Boualem Sansal a été interpellé le samedi 16 novembre à l’aéroport d’Alger, à son retour de Paris, par des agents de la DGSI. (Photo par BARBARA SAX / AFP)
Le régime algérien a lancé une vaste campagne de répression ciblant les intellectuels du pays. L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, 75 ans, a été arrêté le samedi 16 novembre à son arrivée à l’aéroport d’Alger en provenance de Paris par des membres de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).
Par ailleurs, l’écrivain Kamel Daoud et son épouse, psychiatre, font l’objet de poursuites pour avoir utilisé et dévoilé l’histoire d’une patiente dans le cadre de l’écriture du roman Houris, qui a reçu le Prix Goncourt 2024.
Boualem Sansal est en garde à vue depuis près d’une semaine dans les locaux des services de sécurité à Alger. Il est dans l’attente de sa présentation devant le procureur de la République et encourt des peines de prison pour « atteinte à l’unité nationale », selon Le Monde.
D’après la presse algérienne, les poursuites engagées contre lui seraient liées à des déclarations récentes faites à un média français, dans lesquelles il évoquait « l’appartenance de certaines villes de l’ouest algérien, comme Oran et Tlemcen, au Maroc ».
Boualem Sansal est accusé par le régime d’« atteinte à l’unité nationale et à l’intégrité territoriale » ainsi que d’« incitation à la division du pays », des chefs d’inculpation qui, selon le code pénal algérien, sont passibles de lourdes peines de prison, rapporte une source citée par RFI.
« Toute la partie ouest de l’Algérie faisait partie du Maroc »
Dans un entretien accordé à la chaîne en ligne Frontières, Boualem Sansal a remis en question un tabou majeur du régime algérien, en place depuis l’époque de Houari Boumédiène. Il y affirme que :
« La France n’a pas colonisé le Maroc parce que c’est un grand État. (…) C’est facile de coloniser de petits territoires sans histoire, mais coloniser un État, c’est très difficile. »
Il poursuit :
« Quand la France a colonisé l’Algérie, toute la partie ouest de l’Algérie faisait partie du Maroc : Tlemcen, Oran et même jusqu’à Mascara. (…) La France, en instaurant son protectorat au Maroc, a décidé arbitrairement de rattacher tout l’est du Maroc à l’Algérie en traçant une frontière. »
Répression des voix critiques
L’arrestation de Boualem Sansal et les poursuites visant Kamel Daoud apparaissent comme une tentative du régime algérien de museler les voix libres et critiques au sein de l’intelligentsia. Cette répression semble s’inscrire dans une stratégie de contrôle visant à neutraliser toute contestation face au régime autoritaire en place à Alger.
