Tunisie. Présidentielle : arrestation du candidat Lotfi Mraihi
Le candidat à l’élection présidentielle du 6 octobre prochain et président de l’Union populaire républicaine (UPR), le médecin Lotfi Mraihi (64 ans), a été arrêté dans la nuit du mercredi au jeudi 4 juillet 2024. Pour son parti, il s’agit d’un harcèlement judiciaire méthodique supplémentaire visant tout aspirant sérieux au scrutin menant à Carthage.
Pour rappel, dès le 1er juillet, le porte-parole du Tribunal de première instance de Tunis, Mohamed Zitouna, avait révélé qu’une instruction avait été ouverte contre Lotfi Mraihi. Le président de l’UPR ainsi que la secrétaire générale de son parti sont en effet soupçonnés de « blanchiment d’argent », de « déplacement illégal de biens » et « d’ouverture de comptes bancaires à l’étranger sans autorisation de la Banque centrale ».
Selon Zitouna, l’affaire a été révélée par la secrétaire générale de l’UPR qui avait été auditionnée dans le cadre d’une autre affaire portant sur de faux parrainages lors de la campagne pour la présidentielle en 2019. Elle avait alors avoué qu’elle aidait Lotfi Mraihi à transférer de l’argent vers ses comptes à l’étranger. La secrétaire générale de l’UPR avait été placée en garde à vue et un mandat de recherche avait été émis contre Lotfi Mraihi, une procédure de plus visant un personnalité politique « high profile » après Abir Moussi et d’autres prétendants sérieux à la plus haute fonction de l’Etat.
L’avis de recherche en question avait depuis fuité sur les réseaux sociaux. Plusieurs figures proches du pouvoir ont en outre lancé un appel à la population pour dénoncer « le fugitif ».
Une capture humiliante
Mais tard dans la nuit du 3 juillet, une photo circule sur les réseaux sociaux tunisiens montrant le moment de l’arrestation de Lotfi Mraihi au milieu de ce qui apparaît comme le satisfecit de policiers en civil dans une résidence de Nabeul. L’image du candidat à la présidentielle en captivité est massivement partagée sur les pages réputées proches du régime et semble avoir été prise par l’un des agents ayant participé à l’arrestation.
Ironie du sort, la dernière vidéo de campagne en date de Mraihi avait pour objet la nécessité de mieux former les agents des forces de sécurité du pays à davantage de déontologie professionnelle, de façon à pacifier leurs rapports avec les Tunisiens.
Report de l’affaire Chaima Issa
En marge de cette actualité judiciaire décidément chargée, la Cour d’appel militaire de Tunis a décidé, jeudi 4 juillet 2024, de reporter l’audience de l’activiste du Front du salut Chaima Issa au 10 octobre 2024, a annoncé son avocate Dalila Ben Mbarek Msaddek.
Le 8 mai dernier, Chaima Issa avait indiqué avoir été condamnée par la chambre pénale de la Cour d’appel militaire de Tunis à une peine d’un an de prison ferme. Mais la peine avait été prononcée par contumace. Toutefois, Chaima Issa est parvenue à déposer un recours et une séance a été fixée au 6 juin. Le tribunal avait décidé de maintenir sa condamnation en première instance tout en modifiant la peine de privation de liberté d’un an de prison avec sursis en un an de prison ferme.
Les menaces de Korchid
Par ailleurs, poursuivi lui aussi, l’ancien ministre et juriste Mabrouk Korchid a publié aujourd’hui jeudi 4 juillet 2024 une vidéo sur ses réseaux sociaux où il fustige le fait d’avoir été contraint à l’exil dans une destination inconnue et séparé de sa famille. Revenant sur les affaires en justice qui l’ont ciblé, l’ancien ministre des Domaines de l’Etat a déclaré qu’il sortira bientôt de sa réserve pour révéler tout ce qu’il sait dans un livre mais aussi dans des vidéos à venir.
« Je vais vous dire à cœur ouvert les sombres vérités que je connais et dont j’ai été témoin quatorze ans durant. Je vais vous parler des années de lutte, puis des années de défaite et celles de la victoire. Hélas, des gens malveillants qui ne soucient guère de la dignité des autres n’ont fait que se demander comment j’ai quitté le pays alors que la vraie question est de savoir pourquoi je me suis contraint à l’exil (…) je révèlerai les détails de ma sortie du territoire tunisien dans mon livre qui va évoquer ces détails, aussi ceux de la confiscation de 2017, mon conflit avec les islamistes, l’affaire Baghdadi Mahmoudi, la lutte que nous avons menée et les années du gouvernement Youssef Chahed que je considère comme obscures » a-t-il regretté.
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