Tunisie. Le budget 2024 de la présidence de la République dépasse la barre des 200 millions de dinars
Si le président de la République Kais Saïed lui-même n’a eu de cesse de préconiser de réduire et rationaliser les dépenses de l’Etat, l’austérité ne semble pas en revanche toucher le budget de son propre département pour qui l’adage charité bien ordonnée commence par soi-même, ne semble pas de mise.
Adopté le 20 novembre, en plénière de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le budget de la présidence de la République a ainsi été approuvé comme une lettre à la poste, à l’unanimité de 132 voix sans nulle abstention ni objection. « Que quelqu’un ose s’y opposer ! « , plaisante un internaute taquin. Pour l’opposition non représentée dans l’hémicycle, ayant boycotté les législatives, ce vote caricatural représente en soi un baromètre de la démocratie dans le pays « en état de mort clinique ».
Certes en constante augmentation depuis plusieurs années consécutives, sous les prédécesseurs de Saïed, ce dernier étant l’incarnation du « président des plus démunis » dans l’inconscient collectif des Tunisiens, on pouvait légitimement s’attendre à quelques économies même symboliques… Il n’en est rien. Pourtant fin 2022, lorsque fut débattu le budget 2023, la révélation d’une commande de 1,2 million de dinars (375 mille €) incluse dans le budget réclamé par le Palais de Carthage, avait déjà soulevé une mini polémique à l’aune des pénuries que connaissait le pays.
L’augmentation de la masse salariale pour seul argument
Dans le détail, le budget de l’institution présidentielle prévu pour l’année 2024 affiche une hausse des dépenses de gestion courante et des dépenses d’investissement. Interrogé par les rares courageux députés sur le bien-fondé de cette augmentation, le premier conseiller auprès du président de la République, Mourad Halloumi a explicité la structure bipartite du budget de son administration. S’agissant du volet dépenses de gestion courante, le responsable a tenu à préciser que l’augmentation des dépenses courantes tient à la hausse de la masse budgétaire des rémunérations.
Ainsi dans cette rubrique, il a mentionné les nouvelles recrues, les promotions, les emplois fonctionnels ainsi que l’indemnité de spécialisation relative au programme de la sécurité présidentielle, un dispositif toujours plus imposant, à en juger les derniers déplacements du cortège présidentiel.
Concernant les dépenses d’investissement, l’orateur a souligné que ce volet budgétaire a été également revu à la hausse dans le cadre du budget de 2024 avec un montant de 12.830 millions de dinars divisés entre construction de nouveaux bâtiments administratifs et de vague « acquisition d’équipements et de matériel ».
+18,3% en deux ans
« L’ensemble des crédits budgétaires alloués au titre du budget de 2024 concernent trois programmes essentiels de l’institution de la présidence de la République en l’occurrence le programme de la sécurité nationale et des relations extérieures, le programme présidentiel de sécurité et de protection des personnalités officielles, et le programme de commandement et de soutien », apprend-on.
Ces programmes nécessitent la mobilisation d’une enveloppe globale estimée à 214 millions et 270 mille dinars, dont 75,29 % sont des dépenses de rémunération et 18,4 % des dépenses de gestion et d’intervention, soit une hausse de 4,92% par rapport au budget de 2023 (191 millions de dinars).
En comparant avec le budget de l’année précédente, celui de 2022 compris dans la loi de Finances complémentaire, le budget de Carthage, en constante augmentation, s’élevait à 168,328 millions de dinars. L’augmentation pour l’année 2023 était déjà notable, avec une hausse de 22,672 millions de dinars, soit une progression de 13,4%. Un budget qui aura explosé en 10 ans, puisqu’il s’élevait à 79,303 millions de dinars en 2013, soit quasiment le triple aujourd’hui.