L’ONU appelle à l’arrêt des expulsions de migrants en Tunisie
Lors d’une déclaration du porte-parole adjoint de l’ONU Farhan Haq aux journalistes au siège de l’ONU à New York, le responsable a demandé au nom des Nations unies à l’arrêt immédiat des expulsions de migrants de Tunisie.
« Nous sommes profondément préoccupés par l’expulsion de migrants, de réfugiés et de demandeurs d’asile de Tunisie vers les frontières libyennes et algériennes », a précisé Farhan Haq.
Le porte-parole a renchéri : « Tous les réfugiés migrants et demandeurs d’asile doivent être protégés et traités avec dignité et dans le plein respect de leurs droits humains, quel que soit leur statut et ce, conformément au droit international relatif aux droits humains et aux réfugiés ».
Déni du ministre tunisien de l’Intérieur
Réagissant à ces propos hier jeudi 3 août, le ministre de l’Intérieur, Kamel Feki, a affirmé que les récentes sorties de certaines organisations internationales concernant la situation des migrants en Tunisie sont « imprécises » et peuvent même être qualifiées de « trompeuses ».
Pour Feki, les allégations sur les expulsions « ne sont ni fondées ni basées sur une vérification ni des recoupements ». Dans le déni le plus total, il déplore par ailleurs les « répercussions sur le travail de l’institution sécuritaire qui fait tout son possible pour secourir et venir en aide aux migrants aux frontières terrestres ou maritimes ».
Kamel Feki précise que 15.327 migrants irréguliers auraient été secourus entre janvier et juillet 2023, dont 95% originaires de pays subsahariens, et indique que ces opérations sont « menées dans le total respect des normes des droits de l’Homme et en coordinations avec des organismes compétents et notamment le Croissant rouge ».
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Le ministre de l’Intérieur a également réfuté les allégations sur l’expulsion des immigrés africains en situation irrégulière, notant que ce dossier est traité « conformément à la loi tunisienne, et conformément aux exigences des traités internationaux, expliquant que l’État tunisien n’est pas responsable de tout ce qui se passe en dehors de ses frontières ».
« Faux » rétorquent de nombreuses ONG et médias qui ont documenté de nombreuses exactions :
Passe d’armes en Italie
Pendant ce temps en Italie, dont le gouvernement Meloni est le nouvel allié stratégique du président tunisien Kais Saïed, le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, a considéré que le cadre institutionnel de la Tunisie lié à la question migratoire est « suffisamment solide pour qualifier le pays de sûr », et ce malgré les récents développements et la situation de migrants.
Une affirmation qui n’était pas du goût du vice-président de l’alliance Verts et gauche au sein du parlement italien, Marco Grimaldi. Ainsi dans une déclaration relayée le 3 août 2023 par l’agence de presse italienne Nova, Marco Grimaldi a appelé Antonio Tajani à « visionner les images et à constater la situation désastreuse des migrants ». Grimaldi a déclaré que 1.200 personnes ont été expulsées de la Tunisie vers les frontières algériennes et libyennes. Selon le député, « l’Italie a condamné l’avenir de ces personnes innocentes ».
« Les rapatriements forcés vers la Tunisie représentent 73,5 % du nombre total de rapatriements effectués par l’Italie… Sur de nombreuses vidéos, on peut voir des gardes-frontières libyens donner à boire à des migrants épuisés, abandonnés pendant des jours dans le désert », a-t-il déploré.
Le parlementaire est enfin revenu sur la découverte des corps de Fati et Marie Dosso. Devenue un symbole de cette détresse, la photographie a fait le tour de la toile. Elle montre le décès d’une mère et de sa fille dans une région désertique de la frontière tuniso-libyenne. « Tajani n’a-t-il pas vu la photo des corps de Fati et Marie Dosso ? Elles sont mortes de soif, comme d’autres, parce que le gouvernement tunisien de Saïed a expulsé et déporté à la frontière libyenne des centaines de migrants d’Afrique centrale et occidentale en quête d’asile, y compris des enfants, des bébés et des femmes enceintes », a-t-il regretté.