Tunisie. L’UE conditionne à nouveau tout accord au prêt du FMI

 Tunisie. L’UE conditionne à nouveau tout accord au prêt du FMI

Le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, affiche une entente cordiale avec son nouvel homologue tunisien, Nabil Ammar, à Rome

« Tout accord de l’UE sur l’assistance macro-financière à la Tunisie est tributaire de la conclusion d’un accord avec le Fonds monétaire international », a déclaré la Commission européenne hier 27 avril.

La déclaration sonne comme une fin de non-recevoir face aux appels répétés de l’Italie en faveur d’une approche plus flexible vis-à-vis du pays, donnant la priorité à l’aide urgente à la Tunisie à court de budget. Obsédée par la question migratoire et le péril d’une vague incontrôlable de migrants, l’Italie de Giorgia Meloni (extrême droite) s’est en effet récemment autoproclamée alliée numéro 1 du régime du président Kais Saïed, mais sa voix demeure minoritaire au sein de l’UE.

Tunis et Rome s’accordent à dire que la situation économique tunisienne ne permettra pas à l’horizon juin 2023 d’honorer les dettes du pays tout en trouvant les fonds nécessaires à une surveillance accrue des côtes méditerranéennes.

Or, « des discussions sont en cours entre la Tunisie et le FMI et un accord entre eux ou sur un programme de réformes permettrait à la Commission d’envisager une assistance macro-financière pour soutenir la Tunisie », a déclaré un porte-parole de la Commission européenne à la presse jeudi.

En somme, la condition préalable reste que la Tunisie conclue d’abord un accord avec le FMI sur un ensemble de réformes globales. Cela constitue une victoire de la position de Josep Borrell déjà exprimée dès mars dernier, le chef de la diplomatie européenne exigeant la signature du président tunisien en personne avec le Fonds.

 

La Tunisie au centre d’un nouveau jeu des axes géopolitiques

Mais l’Italie, sans doute consciente du jusqu’auboutisme du président Saïed, avait plutôt suggéré une aide financière sans cette condition préalable, du moins dans un premier temps, de sorte de faciliter le démarrage des réformes économiques et politiques, alors que les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne discutent depuis lundi de la manière de s’assurer que l’instabilité du pays n’alimente pas l’immigration illégale vers l’Europe.

« La Tunisie est un pays clé pour la stabilité en Méditerranée et en Afrique du Nord », a déclaré le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, à son arrivée à Luxembourg pour les négociations de l’UE, lui qui évoque la Tunisie désormais de façon quasi quotidienne. Il a notamment déclaré le même jour non sans franc-parler « qu’il ne faudrait pas laisser la Tunisie à la Russie et la Chine ». Le même ministre avait déclaré fin mars que « si la Tunisie n’est pas soutenue, les Frères musulmans pourraient créer de l’instabilité ».

Hier jeudi, l’administration Biden fut accusée d’hypocrisie à l’égard de la Tunisie lors d’une audition houleuse au Sénat, en raison de sa décision de réduire l’aide économique et humanitaire tout en maintenant le soutien militaire au pays alors que sa démocratie s’y meurt. « Je ne comprends pas quel message nous envoyons en réduisant à néant nos aides à la société civile tunisienne, tout en préservant notre aide militaire », a ainsi fustigé le sénateur démocrate Chris Murphy.

Jeudi, le président Kais Saïed a nommé un ambassadeur tunisien en Syrie, une première après plus d’une décennie de rupture des relations diplomatiques entre les deux pays.