Tunisie. Mandat de dépôt contre Rached Ghannouchi
L’octogénaire avait été interpellé le soir du 17 avril à son domicile quelques minutes après la rupture du jeûne suite à ses déclarations considérées par le Parquet comme étant une incitation menaçant la paix civile. Nous venons d’apprendre qu’un mandat de dépôt a été émis contre lui.
L’audition de Rached Ghannouchi, de l’ancien député Ahmed Mechergui et de Youssef Nouri avait débuté hier mercredi. Après de longues heures de plaidoyer de plusieurs avocats de la défense qui se sont poursuivis à l’aube dans la nuit du mercredi au jeudi 20 avril, le juge d’instruction auprès de la 33ème chambre du Tribunal de première instance de Tunis a rendu sa décision au petit matin : le chef d’Ennahdha et ancien président du Parlement restera en détention, un mandat de dépôt ayant été émis à son encontre. Il avait entre-temps été hospitalisé.
D’après des membres de sa famille, Ghannouchi avait refusé dans un premier temps de répondre aux enquêteurs en l’absence de ses avocats. Le même juge a en revanche décidé de maintenir en état de liberté cinq membres d’Ennahdha poursuivis dans la même affaire de complot contre la sûreté de l’Etat : Mohamed Bouchniba chargé de l’encadrement des étudiants affiliés au parti, Abdellah Skhiri, Mouwafak Kaâbi gendre de Ghannouchi, Mohamed Goumani ancien député, et Belgacem Hassen. Pour rappel, d’autres accusés dont Rafik Abdessalam, ancien ministre, lui aussi gendre de Ghannouchi, et le journaliste Mokdad Mejri sont considérés comme étant en fuite dans le même dossier.
La défense boycotte une partie de la procédure
Nous avons également appris que les avocats de la défense ont refusé de signer les procès-verbaux des auditions « pour vice de procédure ». L’avocate Monia Bouali a par ailleurs indiqué que les avocats ont été empêchés de contacter leurs clients, visiblement au motif que le procès se fait en l’occurrence en vertu de la loi antiterroriste.
Rached restera donc à la disposition de l’enquête dans cette affaire, sachant qu’il est visé par au moins trois autres procès dont celui du transport des Tunisiens en zone de conflit, de l’affaire dite de l’appareil secret d’Ennahdha, et de l’affaire « Instalingo » du nom d’une agence de communication ayant des liens présumés avec l’étranger.
Dans une déclaration publiée le 19 avril, le mouvement Ennahdha a appelé à libération immédiate de son président. Le parti dénonce « une grave escalade et appelle à cesser toutes les poursuites engagées contre les opposants politiques ». Les activités du parti ont été gelées, ses réunions et meetings interdits, tout comme ceux du Front du salut national, une coalition dont Ennahdha est la principale composante. Dans un communiqué, le ministère tunisien des Affaires étrangères a fermement rejeté les inquiétudes, exprimées notamment en Europe, après l’arrestation du numéro 1 d’Ennahdha.