Coupe du monde. Chez les supporters franco-marocains : « Quel que soit le résultat, on est déjà en finale »
Ce samedi 10 décembre, il est 22h quand la France vient à bout péniblement de l’Angleterre, en quarts de finale de ce Mondial très relevé et bourré de surprises. Chez elle, à Nanterre (92), Habiba Bigdade n’a rien raté du match. « Maintenant, les Bleus affrontent le Maroc en demi-finale », souffle-t-elle.
Née en France de parents marocains, cette quadragénaire, membre du comité national de la Ligue des droits de l’homme (LDH) sera derrière le Maroc. Un peu par patriotisme, concède-t-elle, mais pas que. « Comme pour le football français, je suis pour les petites équipes amateures. Je suis toujours émue par les petits, les challengers, par ceux qu’on attend pas », explique cette militante de longue date, qui avoue ne pas être spécialement « fan de football ou de sport en général ».
Même son de cloche pour cette autre Franco-Marocaine, Ilhame, directrice de logement social dans les Yvelines, qui salue le parcours des Marocains : « Cette qualification en demi-finale est inédite dans leur parcours. Comment ne pas soutenir cette équipe vaillante ? », demande-t-elle.
Bien entendu, l’autre raison de soutenir le Maroc pour ces deux jeunes femmes, c’est le lien profond avec le pays d’origine. Pour Habiba, voir gagner le Maroc est « une émotion supplémentaire, car comme beaucoup de Marocains, je m’identifie à ces joueurs, à leur parcours de vie et à leur soif de reconnaissance ». Pour Ilhame, « soutenir le Maroc c’est le cœur de mes origines ».
Samia, née à Paris, prof dans un collège à Avignon a choisi le Maroc « pour son parcours incroyable », mais aussi « pour l’espoir qu’elle donne à toute une communauté africaine, en Afrique et ailleurs ! ».
La qualification pour les demi-finales du Mondial, une première pour une équipe du continent, fait énormément de bien, du nord au sud de l’Afrique, comme nous avons pu le constater. Pour beaucoup, le foot est bien plus qu’un sport. Il est une revanche.
Samia résume en quelques mots ce que ressentent certains de ses amis aux origines africaines. « Si la victoire du Maroc sur la France peut mettre un terme à ce paternalisme ambiant envers les pays africains, cette condescendance des pays du Nord envers les pays du Sud et mettre en avant les multiples compétences de ce continent, alors je suis définitivement pour le Maroc », lâche fièrement cette Franco-Marocaine de 39 ans.
Pour le réalisateur Adnane Tragha, les choses sont encore plus tranchées. « Je serai pour le Maroc ! C’est mon pays, celui qui a vu naître mes parents, mes oncles, mes tantes, mes cousins, mes cousines. C’est le pays qui m’ouvre les bras à chaque fois que j’y mets un pied. La question ne se pose même pas, mon cœur a déjà choisi, scande celui qui n’a raté aucun match des Lions de l’Atlas. Et puis comme dirait Mohamed Ali, aucun Marocain ne m’a déjà dit “tu n’es pas Marocain” », raille Adnane, une allusion au racisme qu’il a dû subir en France.
Malgré le soutien affiché pour le Maroc, Samia, Habiba, Adnane et Ilhame ne seront pas tristes si la France l’emporte. « Bien entendu, je serai fière si la France gagne », affirme Ilhame. « C’est déjà un exploit d’être arrivé en demi-finale. Et si la France gagne face au Maroc, je serai tout aussi contente », appuie de son côté Habiba qui promet d’être derrière la France en finale, son pays : « pour vivre ensemble cette ferveur populaire ».
Pour Samia, très fair-play, c’est d’abord « que le meilleur gagne », et si la France se qualifie pour la finale, elle soutiendra les Bleus afin qu’ils « remportent une troisième étoile ».
« De toute façon avec ce France-Maroc, je suis déjà en finale, avoue Adnane. Je ne ressens aucune pression et je serai heureux à la fin quel que soit le résultat », conclut le jeune homme.