Les pays de l’UE se dirigent vers une répartition des demandeurs d’asile
Une majorité de pays européens ont soutenu le 11 juin une proposition à l’initiative de la France, ayant pour objectif d’« aider les Etats méditerranéens sous forte pression migratoire par des relocalisations de demandeurs d’asile ou une contribution financière ». Explications.
Pour le député tunisien Majdi Karbai représentant les Tunisiens dans la circonscription Italie avant la récente dissolution du Parlement, il s’agit d’une « avancée majeure » allant dans le bon sens et dont il se félicite, lui qui n’a eu de cesse tout au long de ces derniers mois de révéler le traitement réservé spécifiquement aux migrants Tunisiens, expulsés dans des proportions bien plus importantes que les ressortissants africains et ceux d’autres pays du Maghreb.
L’accord est même qualifié d’« historique » par Ylva Johansson, commissaire européenne aux Affaires intérieures. Ce mécanisme dit « de solidarité », soumis aux ministres européens de l’Intérieur réunis ce weekend au Luxembourg, est prévu pour 1 an renouvelable, selon le projet de déclaration. Le but serait d’atteindre rapidement les 10 mille relocalisations dans plusieurs pays européens la première année, à titre expérimental donc, dans un premier temps.
Une démarche qui rompt avec le tout répressif
Pour le ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin qui en fait une victoire en partie personnelle, le projet va cela dit de pair avec un renforcement des contrôles effectués aux frontières de l’Union européenne, sachant que la France exerce actuellement la présidence semestrielle du Conseil de l’UE.
En clair, les membres de l’UE et de l’espace Schengen sont invités à s’engager à des relocalisations de demandeurs d’asile depuis les Etats de première entrée, ou à défaut, à apporter à ces pays une contribution financière ou en moyens humains par exemple.
« Plus d’une dizaine de pays membres se sont montrés favorables à des relocalisations, ce qui est très positif », a constaté Gérald Darmanin. La France tout comme l’Allemagne, comptent parmi ces pays. Sauf qu’à ce jeu des quotas, il existe quelques pays qui ont davantage à perdre.
Une réforme de la politique migratoire européenne qui déplaît à certains membres
Ainsi les Pays-Bas ont d’ores-et-déjà clairement annoncé qu’ils n’accepteraient pas plus de demandeurs d’asile, rappelant que leur système d’accueil « est déjà suffisamment sous pression ». Reste que ce pays pourrait « contribuer d’une autre façon », tempère une source diplomatique.
Autre pays membre qui ne veut pas en entendre parler, l’Autriche a exprimé son hostilité, préoccupée par « un mauvais signal envoyé aux passeurs et aux barons de la traite humaine ». Le message serait : « L’Europe est ouverte, l’Europe accueille », a déploré Gerhard Karner, son ministre de l’Intérieur.
Temporaire et non contraignant, le mécanisme entend toutefois surmonter le blocage autour du point le plus sensible du Pacte sur la migration et l’asile présenté par la Commission européenne dès septembre 2020, de sorte d’avancer sur d’autres mesures d’une réforme plus globale que la patate chaude de l’asile, qui comprend en outre une base de données biométriques.
La proposition française œuvre donc à trouver un équilibre qui puisse satisfaire les pays dits de première entrée dont l’Italie, Malte, l’Espagne ou encore la Grèce, qui requièrent que l’effort soit mieux réparti dans l’UE. Rappelons que le règlement Dublin confie au pays par lequel un demandeur d’asile est entré dans l’UE l’examen de sa demande. Mais la France, l’Allemagne et la Belgique notamment soulèvent la question des « mouvements secondaires » : des migrants arrivant sur leur sol, mais dont la demande a déjà été déposée dans un autre pays de l’UE.