Saber Lahmar, ex-détenu de Guantanamo jugé en France pour propagande djihadiste
L’Algérien Saber Lahmar, ancien détenu de Guantanamo, comparait devant la justice française. En prison depuis cinq ans, il doit notamment répondre des accusations de prêches radicaux et d’incitation au djihad.
S’il s’avérait coupable, Saber Lahmar pourrait devenir à lui seul l’allégorie du djihadisme mondial post 2001. De l’Algérie à une mosquée de France, en passant par l’Arabie saoudite, la Bosnie et Guantanamo, l’homme de 52 ans a eu un parcours sinueux, « toujours présent là où l’islam radical a été », selon un magistrat.
Natif de Constantine, en Algérie, il décide de finir ses études islamiques en Algérie. De là, il part travailler pour une organisation humanitaire saoudienne à Sarajevo. La Bosnie sort alors d’une guerre civile sur fond de déchirement religieux et ethnique avec ses voisins de l’ex-Yougoslavie.
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Après les attentats du 11 septembre 2001, il est soupçonné de préparer un attentat contre des intérêts américains en Bosnie et est donc arrêté et envoyé à Guantanamo. Pendant 8 ans, il va y connaître la torture et les sévices des interrogatoires de la sinistre prison. Innocenté par un tribunal américain, la France accepte de l’accueillir en 2009. Il officie alors rapidement comme imam de la mosquée de Saint-André de Cubzac (Gironde). Mais, il prêche aussi dans une salle de prière clandestine située au-dessus du restaurant de son coaccusé Mohamed H.
Discours appelant au martyre
À la barre de la 16e chambre du tribunal correctionnel de Paris, il comparaît aux côtés d’un autre prévenu, Mohamed H. Ensemble, ils doivent répondre de l’accusation d’association de malfaiteurs terroriste délictuelle.
Saber Lahmar se voit reprocher son « ancrage dans l’islam radical » avec des « propos très violents » lors de prêches. Ses discours « s’en prennent aux juifs, appellent à tuer les apostats et appellent au martyre ».
La justice le soupçonne d’avoir entretenu des liens avec plusieurs figures du djihadisme en France, dont Lionel Dumont, braqueur islamiste ancien du « gang de Roubaix », ou Mohamed Achamlane, chef du groupe islamiste Forsane Alizza.
Délit de sale réputation ?
Point de départ de l’enquête, Saber Lahmar aurait en outre « directement encouragé et préparé des départs » à l’été 2015. Notamment « vers la zone irako-syrienne », peut-être contre rémunération de l’association Sanabil. Celle-ci a été dissoute fin 2016 par les autorités françaises qui la considéraient comme au cœur de la nébuleuse djihadiste.
Parmi les voyageurs, Othman Yekhlef, considéré comme « mort sur zone » depuis la fin 2015, ainsi qu’un couple et ses quatre enfants. Le père, Salim Machou, est l’un des sept Français que la justice irakienne a condamnés à mort en 2019 pour leur appartenance au groupe État islamique.
« Nous n’avons dans ce dossier aucun élément probant pouvant montrer que Saber Lahmar aurait amené deux personnes à partir » en zone irako-syrienne, a contesté Me Christian Blazy, son avocat avec Me Alix Villanove. Il est « la victime de sa réputation d’ancien de Guantanamo », assure Me Blazy. Rappelant que la justice américaine l’a libéré « sans qu’aucun fait ne lui soit juridiquement reproché ».