Tourisme à Marrakech. La Covid m’a tuer

 Tourisme à Marrakech. La Covid m’a tuer

Place Djemaa el Fna à Marrakech. Photo : Donar Reiskoffer, WikimédiasCommons

J’en ai rencontré quelques-uns qui faisaient la manche à Casablanca, un groupe de gnawas faisaient contre mauvaise fortune bon cœur en se produisant dans la petite ville de Chefchaouen sous le regard médusé de quelques badauds. Eux aussi ont quitté Marrakech, les larmes aux yeux, ils ne pouvaient plus compter sur la générosité des touristes qui s’agglutinaient autour de la place Jemaa El-Fna.

 

Deux ans de chômage, deux années de plus qui ont fini par tuer tout ce lumpen prolétariat qui vivotait grâce au spectacle exotique des cabrioles de serpents et autres singes magots. Et ce n’est là que la partie visible de la crise du tourisme en ces temps de pandémie. La partie cachée, ce sont ces milliers de travailleurs, obligés de changer de métier quand ils le peuvent ou encore.

Ce sont aussi ces hôteliers contraints de faire du social, en acceptant de payer des parts de salaires à des employés pour ne pas mettre la clé sous le paillasson, les aides versées par l’Etat aux employés du secteur, 2.000 dirhams par mois ne peuvant pas compenser le manque à gagner. Sur les 1 900 établissements touristiques dont les 250 hôtels, toutes catégories confondues, seuls d’ailleurs 110 sont opérationnels à l’heure actuelle.

L’an dernier, le royaume a ouvert les bras à juste 2,2 millions de touristes, ce qui équivaut à une baisse de 78% par rapport à 2019, selon les chiffres officiels. Pourtant pilier de l’économie marocaine, les recettes du secteur touristique, avoisinant les 80 milliards de dirhams en 2019 (environ 7,5 milliards d’euros), avaient ainsi chuté de 65%.

Pour assurer la reconquête de ses marches touristiques et notamment les amoureux de Marrakech, le Maroc a besoin d’une vraie stratégie autour de ce secteur frappé de plein fouet par une contraction économique terrible due au Covid-19.

Et c’est peut-être le moment pour les pouvoirs publics de s’attaquer aux causes profondes qui empêchent ce secteur clé de l’économie marocaine de jouer pleinement son rôle de locomotive du développement économique et social.

Face à l’émergence de nouveaux marchés à forte croissance, des destinations phares comme Marrakech ou Agadir devront rivaliser de génie pour une modification des caractéristiques culturelles par rapport aux schémas de consommation existants. Ce qui suppose un personnel plus qualifié aux compétences linguistiques et culturelles appropriées, parallèlement à la progression de pays émetteurs comme la Chine et l’Inde dans les flux touristiques internationaux.

Mais pour concevoir de nouveaux produits attractifs, susciter d’autres investissements et innover, les stratégies touristiques du futur devront accorder de plus en plus d’importance à la coopération public-privé.
Ce qui passe par une démarche d’ensemble faisant intervenir un grand nombre d’opérateurs gouvernementaux, seule garantie pour que les politiques du tourisme soient suivies d’effet.