Le Canada prolonge le gel des avoirs du clan Ben Ali, la France réagit

 Le Canada prolonge le gel des avoirs du clan Ben Ali, la France réagit

Réunion du Conseil des droits de l’Homme, le 23 mars 2021

Lors de son intervention en marge d’une séance plénière au Parlement, la ministre de la Justice par intérim Hasna Ben Slimane a révélé que le gel des biens mal-acquis du président déchu Zine El Abidine Ben Ali et de sa famille au Canada vient d’être prorogé de cinq années.

Le ministère avait transféré le dossier de prorogation du gel des avoirs du clan Ben Ali au chargé du contentieux de l’Etat qui l’a à son tour déféré aux autorités canadiennes, d’après Hasna Ben Slimene. « Cette prorogation de cinq ans a pour but d’accorder plus de temps aux autorités tunisiennes pour assurer la restitution des biens à la Tunisie », a-t-elle précisé lors d’une séance de questions au gouvernement à l’Assemblée des représentants du peuple.

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En fuite un temps au Canada, Belhassen Trabelsi, l’aîné de la fratrie, est accusé notamment de transferts illégaux de fonds à l’étranger. Les délais du gel des biens expirant tous les cinq ans, il incombait aux autorités tunisiennes de présenter une nouvelle demande justifiée par un dossier pour bénéficier de ce renouvellement.

 

Le Conseil des droits de l’Homme se prononce sur la question, la France en porte-à-faux

Réuni concomitamment à Genève, le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies (OHCHR) a adopté dès le lendemain de la décision canadienne, au terme de sa 46ème session ordinaire, une résolution africaine présentée précisément par la Tunisie en partenariat avec la Libye et l’Egypte sur « les répercussions négatives sur les droits de l’Homme de la non-restitution des biens mal-acquis ou spoliés à leurs pays d’origine ».

La résolution a été votée par une majorité confortable des deux tiers soit 31 pays pour, 14 contre et 2 qui se sont abstenus. Parmi les votes favorables on trouve les pays arabes, africains, islamiques et de l’Amérique latine dont la Chine, la Fédération de Russie, l’Inde, l’Indonésie, le Bengladesh, les Philippines, l’Argentine, le Brésil, l’Arménie et l’Ouzbékistan.

Quant aux 14 pays qui ont voté contre il s’agit de la France, l’Italie, l’Allemagne, la République tchèque, le Danemark, la Hollande, la Pologne, l’Ukraine, le Japon, la Corée du Sud et la Grande Bretagne. Le Mexique et les Bahamas se sont quant à eux abstenus.

« Merci aux pays qui ont voté pour que la Tunisie récupère ses biens spoliés, et profond regret pour le vote des pays qui n’ont pas soutenu le droit » a commenté Abdelwaheb el Hani, membre tunisien du comité de l’ONU contre la torture qui a qualifié l’adoption de la résolution de « grand succès de la diplomatie tunisienne tant à Tunis, qu’à Genève ».

Si la position d’el Hani reste très politiquement correcte, en diplomate qu’il est, ce vote négatif de la France a été fort remarqué en Tunisie où certaines voix n’ont pas ménagé ce qu’ils ont appelé « le colonisateur d’hier », à l’image du journaliste Habib Bouajila qui a aussitôt réagit aujourd’hui en affirmant que « le vote de la France macroniste contre cette résolution n’est qu’une continuation de la politique d’aide logistique apportée par la France à Ben Ali en 2011 ».