Edito. Les mots ont-ils un sexe ?
Voilà une proposition de loi qui me paraît dénuée de toute arrière-pensée politicienne. Celle déposée par une soixantaine de députés LREM et LR, qui vise à̀ interdire l’écriture inclusive dans les documents administratifs; quoique j’aurais souhaité que ces honorables représentants du peuple aient eu le courage d’aller jusqu’au bout pour interdire totalement cette orthographe.
Il faut savoir que dans toute société, il y a deux types d’individus dangereux pour le vivre ensemble ; les extrémistes de tous bords, ceux du conservatisme, dogmatistes et autres salafistes de la pensée et les autres et ceux qui se situent à l’autre extrémité, pour qui toute normalité est digne de méfiance, alors tout ce qui appartient au monde d’hier doit être revu selon les standards en vigueur aujourd’hui.
La haine des premiers vise les écarts de pensée des uns et des autres, l’intolérance des seconds traque les moindres écarts de langue, de pensée pour en faire un cheval de bataille qui mobilisera les réseaux sociaux jusqu’à satiété.
La bataille pour l’écriture inclusive est commode parce qu’elle épouse l’ère du temps, à l’heure où les femmes dénoncent (à juste titre d’ailleurs, là n’est pas le problème) les harceleurs et autres violeurs en série par MeToo interposé, certains se sont vus investis de la noble mission de dénoncer le viol de la langue durant des siècles par machos interposés.
Des machos trop longtemps impunis, maniant une graphie, qui transpire la domination du masculin sur le féminin exprimée par un langage, qui a toujours refusé de « visibiliser les femmes ».
L’écriture inclusive, avatar idéologique plus que théorie linguistique aurait sa place dans les étals de l’histoire au même titre que le Dadaïsme si elle ne recelait pas un grand danger pour l’avenir de la langue française et pour l’avenir tout court de nombreuses générations à venir.
On ne le fera pas dire deux fois, à ces enseignants qui s’inquiètent des difficultés supplémentaires créées à des élèves déjà̀ bien brouillés avec l’orthographe, on tiendra gré à l’Académie française qui qualifie l’usage de ces « cher.e.s étudiant.e.s ou cher.e.s collaborateur.e.s » de « confusion qui confine à̀ l’illisibilité ».
L’écriture inclusive est pourtant du meilleur chic pour bon nombre de membres d’une élite selon le dernier chic porté par une idéologie importée outre-Atlantique.
Si le combat pour l’égalité entre les femmes et les hommes est noble, l’idéologie n’a rien à voir dans l’usage des langues qui appartiennent à un patrimoine littéraire commun à tous. Y compris à nous autres, Maghrébins qui avons fait de la langue française notre seconde langue.
En témoigne ce bel hommage de Stéphane Hessel qui pensait que « Devenir français et choisir de devenir français. C’est quand même quelque chose qui vous donne une responsabilité à l’égard de cette culture, de ce pays de tout ce que ce pays vous apporte, vous en faites votre richesse. C’est la raison pour laquelle je suis très attaché à ce que cette belle langue française garde sa présence dans le monde ».
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