Maroc : La peine de mort sera-t-elle abolie?

La  peine de mort est toujours en vigueur et les juges continuent de condamner à la peine capitale. Toutefois, il existe un moratoire de fait sur les exécutions et certains condamnés voient leur peine commuée en détention perpétuelle. Les abolitionnistes se réunissent ce week-end à Rabat.

C’est aujourd’hui que Rabat accueille l’assemblée générale annuelle de la Coalition mondiale contre la peine de mort. L’événement a de quoi surprendre en apparence dans un pays où la peine capitale est toujours en vigueur, mais qui se trouve à mi chemin entre ceux qui exécutent et ceux qui ont aboli le châtiment suprême. Au Maroc, en effet, la situation est complexe. L’ONG Ensemble contre la peine de mort considère que le royaume a « suspendu » la peine de mort. Cette situation n’est pas le fruit d’une décision officielle, mais plutôt d’un constat. La dernière exécution remonte à 1993, au temps d’Hassan II. Mohammed VI n’a signé aucune exécution depuis son arrivée au sommet de l’Etat. Toutefois, il y aurait environ 150 condamnés à mort en attente de leur exécution. Les tribunaux, de leur côté, continuent de prononcer des condamnations à mort, souvent dans des affaires de terrorisme. Les juristes estiment, sans être tous d’accord sur le nombre exact, que plusieurs centaines de crimes sont passibles de la peine capitale. Autant dire qu’une abolition, si elle était décidée, nécessiterait un sacré nettoyage des textes en vigueur.

Pourtant, plusieurs points plaident en faveur d’une abolition. Le moratoire de fait sur les exécutions semble bien établi, avec près de 20 années sans une seule exécution. En 2005, 25 condamnations à mort ont été commuées en prison à vie par le souverain. En 2009, à l’occasion du 10ème anniversaire du règne de Mohammed VI, 32 condamnés à mort ont vu leur peine commuée en prison à perpétuité. Plusieurs textes internationaux ratifiés par le Maroc engagent le pays à abolir la peine capitale. C’est notamment le cas du Statut de la Cour pénale internationale (CPI) qui interdit le recours à la peine de mort.

La nouvelle constitution, qui sera soumise à référendum ce 1er juillet, décrète le « droit à la vie » ce qui est interprété par des abolitionnistes marocains, comme un pas décisif vers l’abolition.

Au cours de son assemblée générale, la Coalition mondiale permettra à de nombreuses personnalités marocaines et internationales de prendre la parole : Amina Bouayach, de l’Organisation marocaine des droits humains, Khadija Riyadi, de l’Association marocaine des droits humaines ou Driss El Yazami, du Conseil national des droits de l’homme. Des personnalités venues d’Europe et du Moyen Orient participeront également à la réunion. La Coalition marocaine contre la peine de mort (CMCPM) rassemble 7 ONG : l’Observatoire marocain des prisons, l’Association marocaine des droits humains, le Forum marocain pour la vérité et la justice, l’Organisation marocaine des droits humains, l’Association des barreaux d’avocats au Maroc, Amnesty International Maroc et le Centre pour les droits des gens.

Des sessions ouvertes auront lieu samedi 25 juin sur la peine de mort dans le monde arabe et l’inhumanité de la peine capitale, thème de la Journée mondiale contre la peine de mort 2011. Plusieurs tables rondes seront au programme de cette journée afin de savoir comment travailler avec les médias et les blogueurs et quelles sont les stratégies efficaces et outils disponibles pour l’abolition dans le monde arabe.

Cyril Bonnel