France- Crise de l’hébergement social d’urgence
Deux semaines après la démission de Xavier Emmanuelli, président du Samu social, «parce que ce n’est plus gérable», les professionnels du secteur se sont mis en grève mardi 2 août pour manifester contre une diminution du budget dédié à l’hébergement social. Ce mouvement de contestation a été suivi dans une trentaine de départements selon la Coordination nationale des professionnels de l’urgence sociale.
«D’habitude, il est assez rare que les travailleurs sociaux, ceux qui travaillent sur le terrain, descendent dans la rue pour des revendications politiques», explique Matthieu Angotti, directeur de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, mais «les travailleurs saturent et sont surtout frustrés de ne plus pouvoir aider les personnes en difficultés».
Une situation critique
D’après l’enquête réalisée le 20 juillet par l’observatoire de la Fnars, la situation est alarmante puisque sur les 1.701 demandes effectuées auprès de divers Samu sociaux, 65 % ont reçu une réponse négative. Concernant les familles avec enfants, les résultats s’avèrent particulièrement alarmants. Sur les 780 personnes à avoir sollicité le 115 ce jour-là «en indiquant la présence d’enfants, 576 d’entre elles sont restées sans prises en charge».
Peau de chagrin
Le mécontentement des travailleurs sociaux ne datent pas d’hier. Déjà, en mai dernier, le gouvernement avait annoncé des coupes sombres dans les moyens alloués à l’hébergement social. En Ile-de-France, alors qu’il manque environ 13.000 lits, ce sont 5.000 places supplémentaires qui vont être supprimées. La Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars) va subir une réduction de 30 % de son budget dédié à l’accueil de jour et de 28 % pour ses équipes de maraude. De 110 millions d’euros, le budget alloué au Samu social passe cette année à 90 millions d’euros. Le seul centre d’hébergement pour femmes de la région vient de fermer ses portes et 4 500 places d’hôtel seront bientôt supprimées.
Sélection des pauvres
Selon le ministère du logement, les demandes doivent être «priorisées» et «certaines personnes en demande ont des solutions de logement dans leur cadre familial ou amical, ou encore elles disposent de revenus suffisants pour ne pas être retenues en priorité».
Aujourd’hui, l’État propose une enveloppe budgétaire de 7.000 places par jour. Or, le Samu social déclare héberger dans des hôtels entre 12.000 et 15.000 personnes chaque nuit. Pour Christophe Robert, directeur des études à la fondation Abbé Pierre «un tri inacceptable s’opère entre pauvres. C’est une remise en cause très claire de l’accueil inconditionnel». La Fnars confirme : «Les services d’urgence sont amenés à trier les personnes sans abri, à refuser d’accueillir des familles et à réduire leurs services. Ces contraintes placent les travailleurs sociaux dans des contradictions insupportables». Du coup, certaines préfectures suggèrent aux associations d’exclure les sans-papiers des centres d’accueil d’urgence.
Gypsy Allard