Algérie. Sale temps pour les syndicalistes

 Algérie. Sale temps pour les syndicalistes

Loin d’être intimidée par la répression policière

La volonté de mener des réformes profondes claironnée à cor et à cri par les autorités algériennes est démentie, dans les faits, par des décisions et des actes pour le moins antidémocratiques. Aucune action de revendication n’est désormais tolérée par le gouvernement, de crainte de voir le pays atteint par la vague révolutionnaire qui traverse depuis une année le monde arabe. Hier dimanche, des enseignants contractuels ont été violemment empêchés d’organiser des sit-ins.

Le premier sit-in, prévu devant l’annexe du ministère de l’Education nationale au quartier Ruisseau (Alger) a été violemment dispersé par la police. Bilan : trois enseignants embarqués par la police vers le commissariat d’Hussein Dey et un autre blessé.

L’autre sit-in, qui devait être organisé devant le siège de la présidence de la République, a connu le même sort. Près d’une cinquantaine d’enseignants ont été arrêtés et emmenés vers les commissariats d’El Mouradia, de Hydra et d’Oued Smar.

Il y a une semaine, alors que les membres du conseil de la nation débattaient sur le nouveau projet de loi sur les associations, ces mêmes enseignants contractuels ont été matraqués par la police alors qu’ils tentaient d’organiser une action de protestation devant le ministère de tutelle.

Loin d’être intimidée par la répression policière, la coordination des enseignants contractuels a décidé de maintenir la pression sur le gouvernement.

Ainsi, des rassemblements cycliques seront organisés à partir du 7 janvier devant le siège du ministère de l’Education, pour protester contre l’avant projet de loi sur le statut particulier des travailleurs du secteur de l’éducation.

En fait, ce sont surtout les déclarations tenues le 14 décembre à Laghouat par le ministre de l’Education Aboubakr Benbouzid qui ont mis le feu aux poudres.

En effet, M. Benbouzid a soutenu que le dossier des enseignants contractuels est « clos définitivement ». « Nous avons régularisé 30 000 enseignants contractuels et le reste, non régularisé, n’a rien à voir avec le secteur (de l’éducation) », avait-il tranché.

Une batterie de lois répressives

Assises sur un matelas de devises estimé à plus de 150 milliards de dollars, les autorités algériennes ont du mal à calmer la grogne sociale.

Dans le feu des révolutions arabes, plusieurs catégories sociales ont investi la rue lors du premier semestre de cette année pour exiger une amélioration de leurs conditions socioprofessionnelles.

Voulant éviter un embrasement, le gouvernement a cassé la tirelire en répondant à tout-va à toutes les revendications. La facture était très salée : elle avoisine les 40 milliards de dollars, selon le président du RCD, un parti d’opposition.

Les hausses de salaires étant absorbées par l’inflation, le pouvoir d’achat des Algériens ne s’est pas vraiment amélioré. Et les contestations sociales ont donc repris dès la rentrée sociale.

Voyant venir la bourrasque, le gouvernement a fait parvenir au Parlement une batterie de lois répressives, au risque de se voir reprocher d’aller à contrecourant de l’histoire, c’est-à-dire de cette formidable lame de fond démocratique qui traverse le monde arabe depuis une année, dans le sillage de la révolution du Jasmin qui a mis à genou la dictature de Benali.

Yacine Ouchikh