Algérie. Décès de l’ancien président Ahmed Ben Bella
Le premier président de l’Algérie indépendante, Ahmed Ben Bella, est décédé hier mercredi à son domicile familial à Alger, à l’âge de 96 ans. En février dernier, la capitale algérienne bruissait de rumeurs insistantes sur son décès, avant que ne tombe le démenti de sa famille. (Photo AFP)
« La nouvelle de sa mort est fausse. M. Ben Bella est toujours en vie, sous observation médicale à l’hôpital après avoir été évacué dans la nuit de mardi à mercredi », avait alors confié à l’APS un proche de l’ancien président.
L’été de l’année dernière, il avait contracté une phlébite qui lui avait valu des soins dans un hôpital parisien. Mais début 2012, son état de santé s’est sérieusement dégradé et, en février, il a été admis à deux reprises à l’hôpital militaire d’Ain Naadja pour lui augmenter le taux d’anticoagulants.
L’ami du président Bouteflika
Ces dernières années, Ahmed Ben Bella a noué un grand rapprochement avec le président Abdelaziz Bouteflika à qui il vouait pourtant auparavant une grande inimitié. Et pour cause, l’actuel locataire d’El Mouradia a participé, en juin 1965, aux côtés du colonel Boumediène, au coup d’Etat militaire qui a mis fin à son règne.
Pour certains, cette soudaine et tardive amitié entre les deux présidents obéit à des considérations régionalistes puisque tous les deux sont nés à Tlemcen. D’autres l’expliquent plutôt par une certaine affinité idéologique.
Une chose est sûre, depuis l’accession de Bouteflika au trône, ce dernier a toujours joui du soutien d’Ahmed Ben Bella qui, en contrepartie, a bénéficié d’un statut digne d’un chef d’Etat. Le président Bouteflika vient de décréter un deuil de 8 jours et compte organiser à son aîné des funérailles nationales.
Un parcours militant riche et cahoteux
Il faut dire que la vie d’Ahmed Ben Bella n’a pas été un long fleuve tranquille. Il a certes connu la gloire, mais également la rudesse de la vie de militant et les privations du prisonnier politique.
Né le 26 décembre 1917 à Maghnia (Tlemcen), il a regagné les rangs du parti nationaliste le Parti du peuple algérien (PPA) de Messali Hadj en 1945, au lendemain des massacres du 8 mai de la même année dans l’est algérien. Il connaîtra une ascension fulgurante pour hériter en 1949 de la présidence de l’Organisation Secrète (OS), une aile paramilitaire du PPA-MTLD.
En 1950, il participera aux côtés de Hocine Ait Ahmed au hold up de la poste d’Oran, pour renflouer les caisses de l’OS. Arrêté, il écopera d’une peine de 7 ans de prison. Il s’évadera en 1952 pour regagner le Caire, l’antre du nationalisme arabe.
Il fera partie des 9 chefs historiques du Comité révolutionnaire d’union et d’action (futur FLN), qui ont déclenché la révolution algérienne en novembre 1954. En 1956, il sera arrêté avec 5 de ses compagnons par les autorités coloniales.
Après la signature des accords d’Evian en mars 1962, il prendra part au congrès de Tripoli. Fort du soutien de l’Armée des frontières dirigée par le colonel Boumediène et de l’Egypte de Jamal Abdel Nasser, Ben Bella engagera une épreuve de force contre le gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).
Après les affrontements de l’été 1962, Ben Bella et Boumediene triomphent de leurs adversaires et prennent les rênes du pays. Trois ans plus tard, Ben Bella sera renversé, le 19 juin 1965, par son allié d’hier, le colonel Boumediène, qui n’hésitera pas à le jeter au cachot.
Il sera libéré en 1980 par Chadli Bendjedid qui venait de succéder à Houari Boumediène. Ben Bella rejoint alors l’étranger où il crée le Mouvement pour la démocratie en Algérie (MDA), avant de rentrer au pays au lendemain de l’ouverture démocratique de 1989.
En 1995, il est signataire du contrat de Rome aux côtés notamment d’Ait Ahmed (FFS) Abdelhamid Mehri (FLN) Anouar Heddam (FIS), qui prône une solution négociée de la crise algérienne.
Mais son retour au devant de la scène ne se fera qu’avec l’arrivée au pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika. En 2007, Ben Bella est désigné président du groupe des Sages de l’Union africaine (UA), un organe pour prévenir et intervenir dans les crises qui secouent le continent.
Yacine Ouchikh