L’Instance Vérité & Dignité s’apprête à déployer ses bureaux régionaux

 L’Instance Vérité & Dignité s’apprête à déployer ses bureaux régionaux

Membres d’ASF


L'Instance Vérité et Dignité a reçu mardi 5 mai 2015 les représentants des organisations de la société civile qui accompagneront le processus de son déploiement régional. L’IVD s’apprête en effet à ouvrir 24 bureaux régionaux aux quatre coins du pays, dans un souci de proximité destiné entre autres à faciliter le dépôt de plaintes durant les huit mois qui restent avant la clôture de la réception des dossiers.




 


Elles sont huit ONG au total, sélectionnées par le Programme des Nations Unies pour le Développement, dont deux internationales : Avocats sans frontières et l'Organisation mondiale contre la torture, ainsi que six associations nationales parmi lesquelles le Réseau tunisien pour la justice transitionnelle, le Forum des jeunes pour la culture de la citoyenneté à Kasserine, le Centre tunisien Méditerranéen TunMed et l'Institut tunisien pour la démocratie et le développement ITDD.


Celles-ci entendent jouer un rôle triple au cours de la prochaine étape : l'information, la sensibilisation et l'assistance aux victimes.


C’est dans le sud du pays, notamment à Sfax, Gafsa, Sidi Bouzid, Gabes, Médenine et Kasserine, que les bureaux régionaux de l’Instance Vérité et Dignité ouvriront en premier, des régions où les activistes d’Avocats sans frontières ont affirmé avoir constaté un déficit de sensibilisation à la mission de l’IVD.


Le même jour, une délégation de membres de l’Instance Vérité et Dignité s’est Saïd Aïdi, ministre de la Santé publique, au siège du ministère.


« Prendre en charge les souffrances, y compris psychologiques, subis par les victimes n’est pas simplement une question de volonté politique mais une obligation morale pour l’Etat et l’ensemble de la société », a affirmé Saïd Aïdi qui a déclaré vouloir étudier avec l’Instance les réponses spécifiques à apporter aux victimes d’exactions, tout en évitant les écueils d’une prise en charge parfois synonyme de stigmatisation ou d’une mise au ban de la société.


Il a à ce titre promis la création d’une commission spécialisée mixte entre l’IVD et les experts du ministère de la Santé.


Dans le cadre d’une réforme globale du secteur de la santé, le ministre a par ailleurs affirmé qu’il veillera à l’unification des divers carnets de soin via la création d’une carte à puce commune dont pourront bénéficier les victimes ayant saisi l’IVD, sous des conditions qui restent à déterminer.


« Il faut être moins dans la compassion que dans la redignification », a conclu le ministre pour qui la compassion « n’est pas réparatrice, mais au contraire souvent avilissante », soulignant que « l’autorité publique entend assumer son rôle de sorte qu’il n’y ait ni passe-droit, ni des dénis de droit », l’accès au soin ayant été longtemps instrumentalisé par l’ancien régime à des fins politiques.


En visite d’Etat la semaine dernière en Tunisie, le président de la République Fédérale d’Allemagne, Joachim Gauck, a effectué une séance de travail avec les membres de l’Instance Vérité et Dignité, seule instance indépendante avec laquelle il s’est entretenu avant de regagner son pays.


Internationalement reconnu comme un spécialiste du travail sur la mémoire, Joachim Gauck avait été élu en 1990 à la tête d’une Commission spéciale chargée de superviser la dissolution du ministère de la Sécurité d’Etat, la police politique allemande (l’ancienne « Stasi »).


Il a déclaré qu’il est, à ce titre, « particulièrement intéressé par le déroulement de la mission de l’IVD, et plus généralement de l’expérience tunisienne en matière de justice transitionnelle », et que l’Allemagne est « soucieuse d’y apporter un soutien sur tous les plans ».


« La réussite de la transition démocratique dépend du travail de l’IVD », a insisté le président allemand, ajoutant qu’« il n’y a pas de transition vers la démocratie en l’absence de travail sur la mémoire, tout en reconnaissant qu’« il n’y a pas de modèle préconçu en la matière ».


« Chaque pays a sa spécificité et sa propre voie pour arriver à confronter son passé et régler un passé plus ou moins lourd en termes de despotisme, même si les principes fondamentaux restent les mêmes pour l’ensemble des pays concernés », a-t-il conclu.


Le président allemand avait créé le buzz le 29 avril en marge de sa visite en Tunisie lorsqu’il avait pointé du doigt, sans langue de bois, le problème de la corruption, en affirmant que « la bureaucratie administrative et la corruption peuvent nuire et constituer des obstacles pour les investissements allemands mais aussi d’une façon plus générale pour l’essor de l’économie en Tunisie… »


 


S.S