Netanyahu m’a tuer
Quel est le plus grand ennemi des juifs israéliens ? Lequel peut aussi être qualifié de plus grand antisémite de tous les temps ? Les regards se braqueront certainement sur Aboubakr Baghdadi, le calife fantôme, mille fois mort et mille fois ressuscité au gré des intérêts américains.
Et encore, le patron de la SARL Daech n’a jamais émis le souhait d’éradiquer les juifs d’Israël, il a trop à faire avec ses coreligionnaires, principales victimes de ses décapitations hollywoodiennes. Contre toute attente, on vous dévoile l’identité du plus grand ennemi d’Israël, c’est tout simplement Benjamin Netanyahu en personne.
D’abord les faits : dimanche 11 octobre, un jeune Palestinien de 13 ans a été tué par balles par les forces de sécurité israéliennes, c’est juste l’une de la vingtaine de Palestiniens blessés par des balles en caoutchouc lors de ces mêmes affrontements près de la colonie israélienne de Beit El.
Dans la même journée, un raid aérien israélien à Gaza a fait deux autres victimes, ou plutôt trois si on compte l’enfant à naître : une femme enceinte et sa fille de deux ans tuées dans leur cuisine, un vrai coup de maître de l’armée la plus morale du monde, comme aiment à le rappeler les brochures publicitaires destinées aux gogos français susceptibles de s’engager dans Tsahal.
De l’autre côté, face aux missiles de Tsahal et aux balles réelles des soldats israéliens, déguisés en RoBocop, les jeunes Palestiniens ont ressorti les armes de la préhistoire, cailloux et couteaux pour faire face aux tanks et autres avions supersoniques. Contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, nous sommes vraiment dans l’escalade, c’est bien une nouvelle intifada qui gronde.
L’étincelle qui a mis le feu aux poudres remonte au début du mois de septembre quand treize jeunes palestiniens ont été blessés dans les affrontements qui ont éclaté lorsque la police israélienne a fait intrusion dans la mosquée Al-Aqsa. Dans un acte de provocation ultime, à l'aide de bombes à percussion et balles en caoutchouc aux Palestiniens, les musulmans ont été évacués d'Al-Aqsa pour que les colons juifs et d’autres touristes mal inspirés aient été admis dans la cour du deuxième lieu saint de l’Islam.
Qui est responsable ? A quoi s’attendaient Netanyahu et ses faucons en autorisant les soldats à piétiner la sacralité d’un endroit où se reconnaissent un milliard de musulmans ?
Pourquoi Netanyahu est-il le véritable ennemi des juifs israéliens ?
On va citer quelques « réussites » à mettre à l’actif de l’homme fort de Tel Aviv. Il a tout d’abord réussi l’exploit d’avoir convaincu une grande partie de ses compatriotes qu’il allait leur offrir la sécurité (en lieu et place de la paix) en faisant d’Israël un état voyou qui assassine ses opposants en les traquant jusque dans leur lit et qu’il allait leur garantir un espace de vie agréable en érigeant des barrières infranchissables autour de leur propriété arrachée de force au paysan arabe du coin.
Quand on voit des Israéliens terrés dans leur maison, des lycéens qui font l’école buissonnière, complètement terrorisés, de valeureux soldats tirant à feu nourri sur une Palestinienne armée d’un simple canif, on voit bien que le sentiment de quiétude est bien au rendez-vous.
Deuxième succès : avec Sharon, on a eu droit aux adolescents de l’Intifada, Netanyahu a fait mieux, il a sorti les femmes de leur foyer pour en faire de farouches lanceuses de pierres. Ce sont désormais des femmes, Keffieh sur le visage, pierre ou lance-pierre entre les mains, de Gaza à Ramallah, qui sont au front en première ligne avec les forces israéliennes. De nombreuses Palestiniennes qui ont décidé de s’approprier un rôle de premier plan dans la contestation anti-israélienne.
La machine de propagande du gouvernement hébreu a provoqué une déstructuration concertée de la pensée israélienne désormais hantée par un néant qui la provoque, qui l’alimente et qui s’en nourrit en retour. Il faut le reconnaître, aujourd’hui, face à ces crimes horribles contre l’humanité, la seule posture dénonciatrice ne suffit pas.
Face à la poussée fasciste du gouvernement de l’état hébreu, le discours de la morale est sans effet, surtout que la bien pensance médiatique occidentale fait barrage à toute critique d’Israël vite transformée en attaque antisémite.
Face au ressentiment des Palestiniens abandonnés par tous et sacrifiés sur l’autel de la realpolitik même par leurs frères arabes, l’heure n’est plus à l’apaisement. Pour paraphraser Michel Serres, même si « l’avenir est toujours, ou presque, inattendu et aléatoire », dès lors, ce qui est certain, c’est qu’il n’est pas de solution envisageable à la crise délétère qui va certainement déboucher sur un combat à mort entre les deux camps, le boucher de Tel Aviv, adepte de l’escalade pour ne pas perdre la face devant ses supporters et les Palestiniens parce qu’ils n’ont plus rien, mais alors vraiment plus rien à perdre.
Alors quand un « Abou Rajab » (prédicateur à la mosquée Al-Abrar à Rafah) brandissant un couteau, lance un appel à ses frères de Cisjordanie : « Poignardez les. Ô Amérique, ô agresseurs croisés, ô sionistes arabes, ô sionistes parmi les juifs criminels : sommes-nous des agresseurs ? Vous êtes venus de votre propre volonté pour être massacrés sur notre terre », on peut être sûr qu’il trouvera bien des oreilles attentives.
Abdellatif El azizi