Polémique autour de l’hypothèque du stade de Radès
Slim Chaker, ministre des Finances, multiplie récemment les effets d’annonce en prévision du budget 2016. Après la multiplication par quatre des salaires des PDG de banques publiques, le ministre garde le cap à droite, en prônant par ailleurs une politique d’austérité économique. Dernière annonce en date le 28 octobre, l’hypothèque du stade de Radès, fleuron national, via le régime des « soukouk » islamiques, afin de financer une partie du budget de l’Etat. Une décision qui a aussitôt déclenché une vive controverse.
« Le budget de l'Etat pour l'exercice 2016 a besoin de 6600 millions de dinars. Environ 2000 millions seront fournis grâce au financement local et le restant de la somme sera assuré via un financement étranger en adoptant le mécanisme des soukouks.
L’économie à l’heure de l’islamo-modernisme
Les « soukouk » (bons) sont des certificats d'investissement conformes à la recommandation religieuse issue du Coran, interdisant aux fidèles directement le prêt à intérêt (ribaa). Ils consistent pour la banque à acheter un bien et à le revendre immédiatement à un prix majoré au client, qui rembourse alors selon un échéancier sur lequel les deux parties se sont entendues. Ils sont en quelque sorte l'équivalent, dans la finance islamique, des obligations dans la finance occidentale.
En l’occurrence, l'Etat vendra des parts du stade à des capitaux du Golfe, remboursables sur une durée de 10 ans. Une clause est inscrite dans le contrat d’hypothèque qui indique que l'Etat reprendra la propriété des terrains mis comme garantie une fois sa dette remboursée.
« Le stade olympique de Radès sera hypothéqué pour garantir des fonds pour le budget de l’Etat », a pour sa part assuré Slim Chaker. « On vend les bijoux de famille », commentait jeudi l’opposition.
Le ministre a justifié cette mesure par la nécessité de soutenir les investissements pour l'année 2016 en attirant des investisseurs tunisiens et étrangers.
La Tunisie comptera par ailleurs sur l'aide de la communauté internationale qui tarde à fournir les 25 milliards de dollars promis pour que la hausse des demandes d'emplois ne se transforme en crise structurelle.
Un stade qui a coûté au contribuable 170 millions de dinars
Construite à l'occasion des Jeux méditerranéens de 2001, l'enceinte de 60 000 places couvertes de Radès s'étend sur 13000 mètres carrés, et se compose d'une aire centrale, de trois terrains annexes, de deux salles d'échauffement, de deux tableaux d'affichage et d'une tribune officielle de 7000 places. La tribune de presse est dotée de 300 pupitres.
Même si le stade revêt une valeur sentimentale auprès des Tunisiens, ayant abrité des matchs de la Coupe d'Afrique des nations 2004 qui fut remportée par la sélection tunisienne, il enregistre toutefois depuis la révolution une baisse de fréquentation substantielle, due d’abord aux interdictions sécuritaires, puis au boycott de l’équipe nationale par les supporters (4 à 5000 personnes seulement en moyenne).
S.S