Stade, autoroutes, télécoms… la Tunisie est-elle en train d’être bradée ?
Citant des sources bien informées, le site Al-Chourouk Online a publié une information selon laquelle le gouvernement Essid a dans ses tiroirs un vaste projet gouvernemental d’hypothèque de deux sociétés publiques, « dont l’une est spécialisée en les prestations de télécommunications ». Plus polémique encore, la mise en hypothèque d’une autoroute entière est aussi envisagée…
Quelques jours après la controversée annonce du ministre des Finances Slim Chaker d’un premier projet visant à hypothéquer le stade olympique de Radès afin de financer une partie du budget de l’Etat de 2016, on apprend donc que ce n’est pas un mais plusieurs projets similaires qui sont en passe d’être concrétisés, sans consultation de l’Assemblée, selon le mécanisme des « soukouk » islamiques, ou ce que d’aucuns qualifient ironiquement d’ « endettement halal ».
Boucler son budget à tout prix ?
Ainsi Al-Chourouk rapporte dans son édition du 5 novembre qu’un projet visant à hypothéquer la société Tunisie autoroutes et deux autres sociétés publiques dont une opère dans le domaine des télécommunications, fait également partie des trouvailles du gouvernement pour financer le budget 2016.
L’équipe gouvernementale récuse cependant le terme « d’hypothèque », en expliquant à qui veut bien l’entendre le montage financier légal : la création d’une entreprise d’exploitation auprès de laquelle l’Etat s’endette. Pour l’économiste Hédi Sraieb, « le Sukuk est un produit financier qui est à la finance islamique ce que les Asset Backed Securities (ABS) sont à la finance conventionnelle ». L’adossement à un actif tangible pour générer des liquidités (cashflows) peut donc être considéré comme un succédané d’hypothèque.
Selon la même source, des hommes d’affaires du Golfe bénéficieront de ces projets sur une période de 10 ans. Une atteinte de plus à la souveraineté nationale après l’affaire Lazard ?
En France, une récente proposition similaire de Nicolas Sarkozy portant sur les autoroutes françaises, étonnamment concomitante, lui attire les railleries de son propre camp : confier à des sociétés privées le contrôle de la vitesse, « une compétence fondamentalement régalienne », concède même un député des Républicains.
Fin octobre, Slim Chaker avait déclaré que le budget de l’Etat pour l’exercice 2016 accusait un manque de 6600 millions de dinars. Environ 2000 millions seront fournis grâce au financement local, le reste étant supposé être assuré à travers le financement étranger, essentiellement en adoptant le mécanisme des soukouks promu dès 2011 par son prédécesseur aux Finances Jelloul Ayed.
S.S