Procès Saboundjian-Bentounsi : Le commissariat de Noisy-Le-Sec refusait de prendre des témoignages
Au 3ème jour du procès de Damian Saboundjian, le policier responsable de la mort d'Amine Bentounsi, abattu d’une balle dans le dos le 21 avril 2012 à Noisy-Le-Sec (93), la parole a été donnée aux témoins directs de la tuerie.
Le 21 avril 2012, Lisa A. prend un cours de conduite avec sa mère. A bord, il y a sa sœur, Ines, et une amie, Clothilde .G.; les deux sont assises à l’arrière du véhicule. Elles sont à Noisy-Le-Sec. Elles entendent un bruit : « on a tous cru que c’était des coups de pétards », relate Lisa A.
Lisa arrête le véhicule et les quatre passagers cherchent à savoir ce qu’il se passe. « Je l’ai vu tomber face contre terre », dit Ines sa sœur. « M. Bentounsi ne semblait pas être à l’arrêt quand il est tombé et il ne faisait pas face au policier », ajoutera Clothilde G. à la barre. Il semblerait donc qu’Amine Bentounsi était bien de dos au moment des tirs et qu’il était en train de courir.
En ce 3ème jour de procès, tout le monde retient son souffle. Les témoignages de ces femmes sont capitaux.
« Le policier était face à moi, j’ai dit à mes filles de se baisser », explique au président Saliha A, la maman. « Au début, j’ai eu peur parce que l’agent nous braquait avec son arme. En plus, j’ai senti qu’il pouvait me tirer dessus. Il était hors de contrôle, l’air paniqué », se souvient Saliha A. « J’avais l’impression qu’il nous regardait droit dans les yeux », ajoute sa fille Lisa qui a fini, comme les autres passagers à se baisser, de peur de recevoir une balle. « Puis il a pointé son arme dans une autre direction », continue Lisa.
La maman, les deux filles et Clothilde finissent par quitter les lieux. Elles rentrent chez elle. Le soir, à la télé, elles voient des reportages sur « l’affaire Bentounsi ». « Les policiers parlaient tous de légitime défense alors que pour nous quatre, c’était pas si évident », explique Ines. De fil en aiguille et de discussions en discussions, elles prennent la décision d’aller témoigner. « Il était important pour nous de faire notre devoir de citoyen », justifie Ines.
Lisa A., appelle donc le commissariat de Noisy-Le-Sec pour pouvoir donner leur version des faits. A l’autre bout de la ligne, un policier lui rappelle qu'il s'agit ici « de faits très graves » et lui demande plusieurs fois si elle a « vraiment vu ce qu'il s'est passé ». Elle s'entend enfin dire qu'il « ne sert à rien de témoigner » et se voit prier de raccrocher. Lisa A. aura le bon réflexe d'appeler un autre commissariat parisien…. Les quatre femmes seront entendues quelques jours plus tard et plusieurs fois par la police des polices.
Alors qu’Ines finissait de témoigner, Damien Saboundjian craquait et se mettait à pleurer à chaudes larmes. En pleine audience, devant le président qui laissa faire, un des collègues de l'accusé vint à son chevet pour lui offrir des mouchoirs. Il le serra alors fort dans ses bras, oubliant que Damien Saboundjian est un justiciable comme un autre et que de telles pratiques sont généralement proscrites pour les personnes lambdas. "C'est la planète Mars", souffle dépitée une avocate.
Nadir Dendoune
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