Projet de loi sur l’égalité dans l’héritage, éternelle pomme de discorde
La proposition du projet de loi organique relatif à la fixation des parts égales dans l’héritage « n’a pas de finalité politique et n’est aucunement une tentative d’interférence dans les affaires religieuses comme cela a été relayé », a déclaré hier lundi le député à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) Mehdi Ben Gharbia. Un imbroglio constitutionnel et théologique loin d’être résolu.
Lors d’une conférence de presse à Tunis, le député de l’Alliance démocratique a indiqué lundi 9 mai que la proposition d’adoption du principe de l’égalité dans l’héritage entre les femmes et les hommes renvoie aux principes prévus par la Constitution de la deuxième République plaidant pour l’égalité femme – homme dans les droits et devoirs.
« Facile à dire », rétorquent les détracteurs de la loi, parmi lesquels certains déplorent « une distraction », regrettant un timing inadéquat à l’ouverture d’un tel débat de société, quoique les mouvements féministes revendiquent cette égalité depuis l’époque de Bourguiba.
Invoquant un texte coranique clair à ce propos, ce dernier n’avait pas osé légiférer sur la question, tandis que de nombreux exégètes martèlent que « contrairement aux idées reçues, le Coran prévoit plusieurs scénarios possibles et un système d’héritage adapté en fonction de situations familiales parfois complexes ».
Une demande populaire ?
Ben Gharbia ajoute que son initiative intervient aussi « en réponse à des demandes formulées par des citoyens dans plusieurs régions du pays ».
Selon les résultats d’un sondage effectué autour de ce sujet, 72% des Tunisiens estiment que l’application de cette initiative législative contribuerait à l’amélioration des conditions matérielles des femmes et au renforcement de leur rôle dans les domaines politique, économique et social, a-t-il argumenté, précisant que cette proposition sera présentée, prochainement, au parlement.
Le président de l’Association « Rassemblement des Imams », Mohamed Hentati, a quant à lui estimé dans une déclaration aux médias locaux qu’il faut « empêcher l’adoption de ce projet de loi de manière pacifique et civilisationnelle, à travers le dialogue, car il est contraire aux principes de l’Islam », tout en mettant en doute les chiffres des enquêtes d’opinion.
La Tunisie sera-t-elle le premier pays arabe suffisamment audacieux pour légiférer sur la question ? Autant dire que nous n’en sommes pas encore là, d’autant que le plus grand bloc parlementaire, celui d’Ennahdha, estime via l’élue Yamina Zoghlami qu’il est encore tôt pour en débattre.
S.S