Six mois de prison avec sursis pour l’enseignant qui avait inventé une agression antisémite
L’enseignant juif qui avait affirmé avoir été victime d’une agression antisémite a été condamné jeudi à six mois de prison avec sursis. L’affaire, survenue quelques jours après les attentats de Paris, avait suscité un vif émoi avant que la police ne se mette à douter de la version de la victime présumée et ne finisse par l’inculper pour avoir inventé cette agression.
Doutes de toutes les personnes impliquées
La cour a finalement suivi la réquisition du ministère public en condamnant Sylvain Tsion Saadoun à six mois de prison avec sursis. Cet enseignant de Marseille avait affirmé en novembre 2015 à la presse avoir été attaqué au couteau par trois hommes se revendiquant de Daech, en ajoutant un certain nombre de détails au récit. « La vérité, c'est qu'il n'a pas été agressé comme il le dit », s’est indigné le procureur André Ribes.
Les différents intervenants dans cette affaire, secouristes, policiers, médecins et experts, ont rapidement douté de la version des faits de ce professeur d’histoire dans une école juive. Des problèmes conjugaux comme pourraient avoir motivé cette invention selon le parquet.
« Je reste sur ma position, j'ai été réellement agressé » a déclaré l'enseignant à la barre. Puis, tentant de balayer les « incohérences » pointées par la présidente du tribunal entre les blessures affichées et les lacérations de ses vêtements, M. Saadoun a précisé : « mes habits ont été déchirés dans un premier temps et j'ai été lacéré dans un second temps ». « Je le crois incapable de faire ça », mentir et se lacérer lui-même, a martelé son épouse, ne cachant pas des problèmes dans leur couple depuis « un an et demi ».
Dans la foulée du traumatisme des attentats de Paris
Tout autant que l’invention, c’est l’attention médiatique qu’a tenté de capter l’affabulateur qui était jugé. M. Saadoun avait reçu la presse à son domicile au lendemain des soi-disant faits, évoquant trois jeunes hommes en scooter qui l'auraient interpellé. « Ils m'ont demandé si j'étais juif ou musulman. Et quand j'ai dit que j'étais juif, ils se sont rués sur moi et m'ont jeté à terre, en me disant qu'ils allaient me faire souffrir et me tuer », avait-il raconté à un journaliste de l'AFP.
L'enseignant avait ensuite abondamment relaté sa prétendue agression devant les médias, aux côtés de responsables de la communauté juive marseillaise, n'hésitant pas à montrer son abdomen et ses avant-bras striés de blessures superficielles. Il était même allé jusqu'à préciser que les assaillants lui auraient montré une photo de Mohamed Merah et un tee-shirt de l'Etat islamique.
Ce récit était intervenu quelques jours à peine après les attentats de Paris et de Saint-Denis du 13 novembre, et au lendemain de l'agression d'une femme portant un hijab, un voile laissant apparaître le visage, à la sortie d'une bouche de métro marseillaise. Une agression véridique, celle-ci.
Rached Cherif
(Avec AFP)