Port du voile sous Ben Ali : la « circulaire 108 » devant la justice transitionnelle

 Port du voile sous Ben Ali : la « circulaire 108 » devant la justice transitionnelle

Bureau d’ordre de l’IVD


C’est un « jour historique » pour plusieurs représentantes d’associations tunisiennes des droits de l’homme, plus spécifiquement celles militant pour les droits des femmes et les libertés de croyance et de culte telles que consacrées par la nouvelle Constitution. La circulaire 108 de sinistre mémoire, interdisant le port du voile dans les établissements publics, avait été instrumentalisée par l’ancien régime pour harceler l’opposition et justifier toutes sortes de violations du droit au travail. Aujourd’hui elles demandent réparation devant l’Instance Vérité et Dignité.




 


Une dizaine d’ONG représentant environ deux cents plaignantes se sont déplacées aujourd’hui pour déposer un dossier collectif, conformément aux dispositions de la loi 53-2013 relative à l’instauration de la justice transitionnelle, au siège de l’IVD.


« Des dizaines de familles et de vies ont été brisées par cette circulaire », a rappelé Salwa Gantri, chef du bureau de l’ICTJ à Tunis, ajoutant qu’il est important ne serait-ce que symboliquement que l’Etat tunisien reconnaisse les dérives inhérentes à l’application de la fameuse circulaire 108 sous l’ex dictature, en réhabilitant ces femmes.


Pour Ibtihel Abdellatif, présidente de la commission Femme au sein de l’Instance, « la réconciliation dans ce domaine n’est pas moins importante que celle avait récemment été illustrée par une poignée de main historique » entre l’Etat tunisien et Slim Chiboub en tant que demandeur d’arbitrage en matière de corruption.  


 


2006 année noire de la répression anti voile


Lors de la rentrée scolaire et universitaire en Tunisie en 2006, lycéennes et étudiantes avaient fait l’objet de harcèlement jusque dans les rues des grandes villes : voiles arrachés, fonctionnaires licenciées, etc.


L’application de la circulaire 108 adoptée en 1981 sous Habib Bourguiba, et qui interdit le port du voile dans les établissements publics, prenait l’allure d’une large campagne répressive, menée par les plus hauts responsables et plus particulièrement ceux du parti au pouvoir, prétextant une recrudescence du port du hijab.


La sphère privée de centaines de femmes et de jeunes filles est systématiquement et brutalement violée au nom de la l’application de la « loi », alors que la controversée circulaire 108 avait toujours dénoncée pour son inconstitutionnalité, y compris au regard de l’ancienne Constitution.


En 2007, le tribunal administratif avait invalidé une décision de licenciement d’une enseignante du secondaire pour port du voile, ordonnant sa réintégration et le versement d’une année de salaire, créant une jurisprudence en matière de droit civil.


 


S.S