Festival de Carthage : 2016 année du renouveau ?
Les organisateurs du Festival international de Carthage (FIC) ont tenu le 28 juin la traditionnelle conférence de presse de présentation du programme de la prochaine édition. Force est de constater que ce 52e FIC est un compromis d’innovations et de modération. Exit les stars planétaires aux cachets inabordables en ces temps de dévaluation du dinar et place à la proximité avec le grand public.
Pas de superstars
« Je ne vais pas risquer un déficit d’un milliard (de millimes, soit 415 000 €), juste pour contenter le public d’un soir avec une superstar », a sèchement répondu Mohamed Zinelabidine, directeur du festival, à la sempiternelle question « mais pourquoi ne pas avoir programmé… » ?
Les conférences de presse préfestival se suivent et se ressemblent : de nombreux journalistes locaux y allant de leurs petites frustrations face à un programme ne contentant pas leurs gouts musicaux particuliers. Chaque fois la même réponse. « Avec un espace de 7000 places, je ne peux pas avoir la même programmation qu’un grand festival en plein air ou un stade européen », explique M. Zinelabidine. Avec un cours du dinar fondant comme la neige sous le soleil d’été carthaginois, il y a longtemps que les artistes européens ou nord-américains les plus en vue sont hors de portée du FIC.
Avec l’appui des sponsors locaux, l’opérateur Tunisie Telecom et l’assureur Star en tête, la 52e édition du festival n’en reste pas moins intéressante et diversifiée. Chœur et orchestre symphonique ukrainien, rappeurs, chanteurs et humoristes de tous horizons, reggaeman ivoirien, sans oublier les chanteuses libanaises et un roi du raï, il faut admettre que la programmation contentera un large public.
Parmi les têtes d’affiche, les jeunes seront nombreux à aller voir l'Américain Low Deep T le 4 aout, le Français Maitre Gims le 19 aout et même Jason Derulo qui passera à Carthage le 19 juillet entre ses dates à Beyrouth et à Las Vegas. Ceux qui préfèrent la musique orientale auront également un large choix : du Tunisien Saber Rebai à la figure montante marocaine Saad Lamjarred, sans oublier les piliers de la scène arabophone Samira Said, Najoua Karam, Kadhem Saher, Cheb Khaled ou encore Zied Gharsa.
Plus de proximité avec le grand public tunisien
Telles des licornes, Adele ou Shakira, dont les noms circulent tous les ans dans les fantasmes des commentateurs à défaut d’être couchés sur le papier glacé du programme, ne seront pas au rendez-vous cette année encore. En revanche, les organisateurs proposent plusieurs nouveautés pour renouveler un événement estival que beaucoup considèrent comme une institution, voire un baromètre du dynamisme culturel tunisien.
L’une des innovations les plus marquantes est sans doute la convention conclue avec la Télévision tunisienne, qui fête son 50e anniversaire cette année. Celle-ci a obtenu les droits de retransmission en direct des soirées d’ouverture et de clôture, ainsi que de quatre concerts du festival. De quoi rapprocher le festival de son public malgré des prix compris entre 25 et 100 dinars (10 et 42 euros) relativement élevés pour la bourse du Tunisien moyen.
Autre nouveauté : la délocalisation d’une partie des spectacles hors du théâtre antique. D’abord à Tunis avec une série de représentations d’artistes tunisiens à l’espace St Cyprien et dans d’autres monuments de l’ancienne Carthage. Ensuite hors de Tunis : Le festival ira jusqu’à Kasserine et Dougga, annonce le directeur Zinelabidine, qui souhaite en faire un festival « qui ose croire que le rêve est permis tant que l’art et la culture lui président vraiment ».
Rached Cherif