Mariage avec un non-musulman : Des associations demandent l’abrogation de la circulaire de 1973
Dura lex, sed lex. La loi est dure, mais c’est la loi, dit la maxime latine. En Tunisie, les circulaires peuvent être plus têtues encore que les lois. C’est le cas de la circulaire du ministre de la Justice du 5 novembre 1973, concernant le mariage des Tunisiennes avec des non-musulmans. Un collectif d’associations se mobilise pour dénoncer ce texte jugé « discriminatoire et anticonstitutionnel ».
Circulaire discriminatoire et anticonstitutionnelle
Bien que contraire à la Constitution de 2014 et même à des traités internationaux ratifiés avant 2011, la circulaire contestée est toujours appliquée. Elle impose dans les faits au futur époux non musulman, généralement non tunisien, d’obtenir un certificat de conversion auprès d’une autorité religieuse.
Cette disposition « est contraire à la Constitution et aux conventions internationales ratifiées par l’État tunisien en matière de libertés individuelles et d’égalité hommes-femmes », s’indignent plusieurs associations tunisiennes et françaises, dont certaines militent depuis des années contre la circulaire de 1973. Dans un communiqué, elles rappellent que la Constitution de 2014 garantit « l’égalité des citoyennes et des citoyens devant la loi » et « la liberté de croyance, de conscience et d’exercice des cultes » et « la protection, la consolidation et l’amélioration des droits acquis des femmes ».
Dans la pratique, la conversion demandée est souvent une formalité. Un fiancé motivé l’obtient facilement en récitant en arabe la profession de foi musulmane (« Il n’y a de Dieu que Dieu et Mahomet est son messager ») auprès d’un des imams habilités par les services d’état civil. Il n’est pas question de circoncision par exemple.
Mariages et enfants non reconnus
Toutefois, certains couples y rechignent, par principe ou par conviction. Ceux qui n’effectuent pas cette démarche sont aujourd’hui dans l’impossibilité de passer devant un maire tunisien pour officialiser leur union. S’ils officialisent leur mariage dans un autre pays – si le couple vit hors du pays ou si l’époux est étranger notamment – le risque est l’impossibilité de faire reconnaitre cette union en Tunisie et donc les enfants qui en naitraient.
Or, la Tunisie a ratifié en 1968 la Convention des Nations Unies sur le consentement au mariage, à l’âge minimum et à l’enregistrement des mariages et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes en 1985. Cette dernière prévoit explicitement une garantie du libre choix du conjoint, rappellent les signataires du communiqué. Ils demandent donc au gouvernement l’abrogation pure et simple de cette circulaire discriminatoire.
Parmi les premières organisations membres de la plateforme figurent l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), le Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), la Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR), le Forum Tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) ou encore le bureau tunisien de Français du monde-ADFE.
Rached Cherif