Torture : un fléau persistant, 5 ans après la révolution

 Torture : un fléau persistant, 5 ans après la révolution

Hamida Dridi


La Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) a officiellement recensé 400 cas de torture en milieu pénitentiaire durant la période allant d’octobre 2013 jusqu’à octobre 2015. Un fléau en hausse, au nom de la lutte contre le terrorisme, mais pas seulement.




 


Selon un deuxième récent rapport sur « la réalité des libertés en Tunisie » présenté le 28 septembre par le président sortant de la Ligue Abdessattar Ben Moussa, « il ne s’agit pas de torture employée méthodiquement », d’où l’exigence d’envisager la réforme des systèmes sécuritaire et judiciaire et de redéfinir la politique pénale dans le pays, y compris pour installer une culture et une mentalité nouvelles au niveau des exécutants et des individus.


Pour Ben Moussa, « la situation des libertés en Tunisie reste insatisfaisante, malgré les quelques progrès accomplis dans ce domaine ». « Bien que criminalisés dans le texte de la Constitution, les actes de torture et d’intimidation ainsi que les peines inhumaines existent toujours en Tunisie », déplore-t-il, au moment où il s’apprête à ne pas renouveler sa candidature à la tête de la LTDH.


Le même rapport fait état par ailleurs de multiples cas d’agressions physiques et morales commises contre plusieurs journalistes depuis la révolution, citant notamment leur comparution récurrente devant la justice civile et militaire, leur interdiction d’accéder à l’information et la destruction de leurs outils de travail. Cette semaine le journaliste Jamel Arfaoui comparaît devant le Tribunal militaire pour avoir couvert la chute d’un hélicoptère dans des conditions non encore élucidées, dans un article où il met en doute la capacité de l’armée à entretenir adéquatement ses appareils.


D’après ce document, « les policiers restent les principaux agresseurs des journalistes ».


Le rapport rappelle enfin la position de la Ligue consistant en une opposition de principe à la peine de mort, « dans la mesure où elle porte atteinte au droit à la vie, nourrit la mentalité de vengeance et risque de favoriser le terrorisme ».


 


L’INLCT en proie à des conflits internes


Pendant ce temps, la jeune Instance nationale de lutte contre la torture peine à assoir son autorité, notamment en raison de sa présidente, contestée par les autres membres.


« Il est temps que l’instance nationale de lutte contre la torture, élue depuis six mois, exerce réellement sa mission d’observation et d’inspection et vérifie les allégations de torture dans les centres de détention et les établissements pénitentiaires », a déclaré jeudi la présidente de l’Instance Hamida Dridi, mère de l’ex leader syndical de l’UGET Wael Naouar. 


Cette dernière évoque « les difficultés rencontrées, quotidiennement, par les membres de l’instance lors de l’accomplissement de leurs tâches », appelant les parties gouvernementales et non gouvernementales à assumer leurs responsabilités, notamment face à la recrudescence des cas de torture dans les prisons. 


« Aucun budget spécifique n’a encore été alloué à l’instance », regrette Dridi, pour pouvoir accomplir son travail comme il se doit, et ce malgré l’importance de son rôle.


Des campagnes de sensibilisation sur les conséquences de la torture doivent être menées en coordination avec les structures et les ministères de l’Intérieur et de la Justice conclue Hamida Dridi, reçue mercredi dernier par le président de la République Béji Caïd Essebsi.


Pour autant, l’instance, seule structure habilitée à effectuer des visites inopinées dans les prisons, a déjà effectué des visites surprise dans des établissements pénitentiaires à la demande des familles des détenus et des gardés à vue.


 


S.S