Aatik, la révolution de laine : Quand le changement vient du bas

 Aatik, la révolution de laine : Quand le changement vient du bas

Première promotion de femmes artisanes du projet. Photo Aatik

Deux jeunes filles se sont investies entièrement pour accompagner des artisanes tunisiennes dans une région rurale de Tunisie. Voilà plus d’un an qu’elles enchaînent les allers-retours entre Tunis et Siliana pour soutenir le désir d’émancipation d’un groupe de femmes. Après les avoir initiés à la vente en ligne de leurs tapis, elles souhaitent désormais franchir un nouveau palier et font appel à la générosité des internautes.


 


De Montréal à Siliana


Elles s’appellent Sophie Bergman et Emma Djilali. L’une est Allemande, l’autre Canadienne. Arrivées en Tunisie comme elles auraient pu arriver dans n’importe quel autre pays pour tenter une aventure internationale, elles ont eu un coup de cœur pour les femmes d’El Aroussa, bourgade de la région de Siliana à deux heures et demie de route de la capitale.


Depuis plus d’un an, elles ont décidé d’accompagner une dizaine de tisserandes en matière de conception de produit et de commercialisation, via le net notamment. Il faut dire que la ville, comme quelques autres en Tunisie, a une tradition millénaire de tissage de tapis berbères, appelés kilims ou mergoums.


Avec un soutien de l’ambassade canadienne, elles ont ainsi mis en place leur projet Aatik. L’objectif est d’encourager les femmes artisanes à prendre en main leur destin. Cela a abouti à la mise en place d’un circuit de vente en ligne et à des formations à l’autogestion pour s’affranchir de la tutelle patriarcale. Pour satisfaire les nouvelles commandes venues parfois de très loin, Emma et Sophie ont parfois dû assurer la logistique et l’approvisionnement en matières premières en jonglant avec un réseau de transport relativement aléatoire dans cette zone reculée.


 


Appel aux dons


Pour la deuxième phase du projet, les deux femmes lancent un appel aux dons sur la plateforme Cofundy. L’objectif relativement modeste, 3200 €, devrait principalement permettre d’accompagner dix tisserandes dans l’établissement de leur propre structure coopérative. Elles ont pour cela besoin de formations en comptabilité, en gestion de projets, en design ou encore en marketing. Le but est de concevoir de nouveaux produits, motifs et couleurs pour se différencier et surtout pour répondre aux gouts du public, principalement européen.


« Nous voulons les aider à travailler ensemble et à se gérer elles-mêmes pour servir d’exemples aux autres femmes », explique Emma. En effet, l’artisanat est, avec l’agriculture, la seule richesse de cette région oubliée de la Tunisie où le chômage atteint les 20 %. Les femmes en sont les premières victimes. Même leur savoir-faire ne permet pas toujours d’assurer un revenu stable. Les techniques de tissage ont très peu évolué, et lorsqu’elles arrivent à vendre leurs tapis, « ce sont souvent les hommes qui en gèrent le produit », ajoute la diplômée en commerce international.


Rached Cherif