Les colossaux enjeux des élections municipales
Véritable arlésienne, sans cesse repoussées depuis la révolution, les élections municipales deviennent un enjeu stratégique pour les forces en présence, en plein contexte de repositionnement et de reconfiguration du paysage politique. Hier 14 décembre, L'ISIE a solennellement exhorté l'Assemblée des représentants du peuple à fixer une date pour les élections municipales.
Nabil Baffoun, membre de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) s’est dit mercredi étonné du « flou » lié à la question des élections municipales censée être une priorité pour les citoyens et pour les acteurs politiques.
Dans une déclaration à l’agence TAP, Baffoun a exhorté le parlement à examiner et à adopter dans les plus brefs délais, le projet de loi sur les élections municipales et à fixer une date pour le scrutin, assurant que tout retard aura une incidence sur les législatives et la présidentielle.
Pour rappel, le ministre des Affaires locales et de l’Environnement, Riadh Mouakher, avait indiqué le 23 novembre dernier que le gouvernement d’union nationale proposera une nouvelle initiative pour « débloquer la situation et trouver une solution concernant la loi relative aux élections municipales ». Le ministre a ajouté que le gouvernement attendra la fin des débats budgétaires pour présenter cette nouvelle initiative. Or, la loi du budget a été votée en fin de semaine dernière.
Mouakher avait rappelé que « le gouvernement est déterminé à organiser les élections municipales vers la fin de l’année 2017 ».
Entretemps, une initiative politique du turbulent homme d’affaires milliardaire Slim Riahi, chef du parti UPL, a brouillé les cartes des uns et des autres. L’homme jusqu’ici allié à la majorité tente de créer un nouveau front avec les dissidents de Nidaa, avec à leur tête Mohsen Marzouk chef d’Al Machroû, pour mieux isoler le camp Caïd Essebsi père et fils. Ce qui explique en partie les tâtonnements et le statu quo actuels face à des élections aux airs de test démocratique grandeur nature qui n’arrangerait pas grand monde.
Cependant « il est difficile d’organiser les élections à la fin du mois de novembre voire en décembre 2017, dans la mesure où le taux de participation durant cette période risque d’être faible voire nulle dans certaines régions », explique Nabil Baffoun.
Fixée dans un premier temps pour le 26 mars 2017, par le président de l’Instance, Chafik Sarsar, la date des élections municipales n'a cessé d'être retardée à cause de l'adoption du projet de loi spécifique aux élections municipales.
Le 26 juillet dernier, Chafik Sarsar avait déjà affirmé l'impossibilité de tenir les élections municipales à la date prévue : « Le retard considérable pris dans l’adoption de la loi relative aux élections municipales et locales va entraîner la révision de la totalité du calendrier électoral établi par l’Instance supérieure indépendante des élections (ISIE) » avait-il déploré, sur fond de suspicions de « loi sur-mesure », à la proportionnelle, pour la majorité au pouvoir.
« Retarder les élections à 2018 (serait) une catastrophe à tous les niveaux », avait déjà prévenu Sarsar, affirmant qu' « Il y a des partis qui aimeraient que ce soit fait le plus tard possible parce qu'ils ne sont pas prêts », lors d’une rare sortie avec commentaire d’ordre politique d’un homme d’ordinaire réservé.
L’Assemblée des représentants du peuple avait entamé le 1er juin dernier l’examen du projet de loi amendant et complétant la loi relative aux élections et référendums, mais les discussions ont trébuché en raison de différends entre les groupes parlementaires autour de certaines questions, dont la parité horizontale et l’octroi du droit de vote aux policiers et aux militaires lors des élections.
Plus que jamais, les municipales seront un « faiseur de roi » prématuré en permettant un rabattage des cartes en vue des élections de 2019.
S.S